Rapport de M. Godron, Doyen de la Faculté des sciences
Nancy (Meurthe-et-Moselle)
; Rapport du Doyen de la Faculté des sciences
;
Partie du document
;
publication en série imprimée
; sr1855_3
;
Est une partie de : Séance solennelle de rentrée des Facultés des sciences et des lettres et de l'École de médecine et de pharmacie de Nancy, le 15 Novembre 1855
par : GODRON, Dominique-Alexandre
seance_rentree_1855_3.pdf, application/pdf, 528,96 Ko,
Titre (dcterms:title)
Rapport de M. Godron, Doyen de la Faculté des sciences
Identifiant (dcterms:identifier)
sr1855_3
Date de création (dcterms:created)
1855
Est une partie de (dcterms:isPartOf)
Créateur (dcterms:creator)
GODRON, Dominique-Alexandre
Sujet (dcterms:subject)
Rapport du Doyen de la Faculté des sciences
Editeur (dcterms:publisher)
Grimblot et veuve Raybois, Imprimeurs-Libraires de l'Académie de Nancy, Place Stanislas, 7, et rue Saint-Dizier, 125.
Direction de la Documentation et de l'Edition (Université de Lorraine)
Institut François Gény (EA 7301 Université de Lorraine)
Décanat de la Faculté des Sciences (Université de Lorraine)
Décanat de la Faculté de Droit Sciences économiques et gestion de Nancy (Université de Lorraine)
Maison des sciences de l'homme Lorraine (Université de Lorraine)
Bibliothèque-médiathèque de Nancy
Date de publication (dcterms:issued)
1855
Format (dcterms:format)
PDF avec ocr
Langue (dcterms:language)
fr
Type (dcterms:type)
publication en série imprimée
Couverture spatiale (dcterms:spatial)
Nancy (Meurthe-et-Moselle)
Droits (dcterms:rights)
extracted text (extracttext:extracted_text)
UNIVERSITÉ
IMPÉRIALE.
a —
ACADÉMIE
DE
a
SÉANCE
NANCY.
e—
SOLENNELLE
DE
RENTRÉE
DES FACULTEÉS
SCIENCES ET DES LETTRES
ET
L'ÉCOLE
DE
DE MÉDECINE
DE
Le
15
ET DE PHARMACIE
NANCY
Novembre
1855.
NANCY,
GRINBLOT ET V° RAYBOIS, IMPRIMEURS-LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE NANCY,
Place Stanislas, 7, et rue Saint-Dizier, 125.
1855.
RAPPORT
M. GODRON, DOYEN DE LA FACULTÉ DES SCIENCES.
Monsecr
LE Recteur,
MESSIEURS,
La Faculté
laboratoires
des sciences venait à peine d'être constituée, ses
étaient en
construction,
ses collections
n'existaient
encore qu'en germe, qu'elle a ouvert ses cours immédiatement
après sa séance d'installation. Il y avait peut-être quelque témé-rité à inaugurer notre enseignement, sans être entourés de tous
nos moyens d'action, de ces objets d'études qui parlent aux yeux
et qui fécondent la lecon du maitre, en lui permettant à chaque
pas d'appuyer
la théorie par l'observation directe des phénomènes,
Mais nous n'avions pas trop préjugé de l'indulgence du publie
Nancéien; nous connaïssions son impatience de voir rouvrir,
aprés tant d'années de suspension, ces cours publics qui firent la
réputation de noire ancienne Université lorraine. Dés lors nous
ne pouvions pas hésiter à suivre l'impulsion qui nous était communiquée et à donner satisfaction aux désirs si légitimes de la
population.
|
Ge qui nous manquait à notre début, en objets matériels d’enseignement, nous l'avons dû, en partie du moins, à l'initialive de
notre Ecole de médecine et du Lycée impérial de Naney, qui ont
mis spontanément à notre disposition leurs collections scien-
_
i6
—
tifiques, el nous ont ainsi procuré les moyens de donner quelque
intérêt à nos
ment,
Je suis
premières
heureux
gratitude envers
les
de
leçons,
pouvoir
quelque
exprimer
vie à notre enscigne-
ici nos sentiments
habiles administrateurs de
de
ces deux établis-
sements, qui ont si bien compris que toutes les écoles sont sœurs,
qu'elles s'appuient
les unes
sur les autres et se complètent mu-
tuellement, enfin, qu'elies doivent rester unies par des liens étroits
de confralernité.
C’est, grâce à ces objets, qui nous
ont été confiés avec tant de
bienveillance,
nos cours. Si
rapports moins
complétement
qu'il nous a été possible d'ouvrir sans délai trois de
nous débutions dans des conditions, sous certains
favorables que celles dont jouissent les Facultés
organisées, les encouragements ne nous ont pas fait
défaut. Vous
savez tous, avec quelle assiduité les cours ont été
suivis, non-seulement au début, mais pendant l’année entière.
M. le professeur de mathématiques pures et appliquées a consacré entièrement le semestre d'hiver, et de plus une leçon par
semaine du semestre d'été, à l'étude de l'astronomie physique.
Mais, afia de ne pas négliger les candidats à la licence és sciences
mathématiques, il a dû, dans
Îe second semestre, traiter une fois
par semaine, les principales questions d'astronomie mathématique
du programme de la licence, telles que la transformation des
coordonnées sphériques, la théorie des réfractions, celle de la
parallaxe et celle de l’aberration. Ce cours a été terminé par létude de la figure mathématique du globe terrestre,
Quant à l'astronomie physique, ses principales applications à {a
mesure du temps et à la chronologie, à la géographie et à la navigation, ont été (raïlées avec détails ; enfin, les points principaux
de Ja théorie de la lune ont été également exposés. Malheureusement, ce cours si important n'a pu être complété, le temps nécessaire a manqué, et le professeur n'a pu s'occuper ni de la théorie
des planëtes et des comètes, ni des merveilles de. l'astronomie
sidérale. Sans aucun doute, le complément de ce cours réunirait
encore, dans une ville comme Nancy, cet auditoire d'élite, qui a
donné à M. le professeur d'astronomie tant de marques de sympathie. Mais les candidats aux grades universitaires réclament de
mm
17
—
li, pendant la prochaine année scolaire, deux cours de mathématiques pures el appliquées, qui doivent les conduire au but
qu'ils se proposent d'atteindre.
M. le professeur de physique a d'abord exposé les lois de la
_pesanteur et de lhydrostatique, ainsi que leurs applications principales. M. Séguin
se proposait
rique, lorsque ce jeune
d'entreprendre
l'étude
et savant professeur, que
famille attiraient si légitimement ailleurs,
du calo-
des licæs de
nous a été enlevé.
Le
cours, toutefois, n'a pas été interrompu : M. le professeur Nicklés,
auquel les sciences physiques sont aussi familiéres que les sciences chimiques, en à élé chargé, jusqu'à Parrivée de M. Chautard.
L'étude
des dilatations et des changements
d'état des corps a élè
l'objet des premières lecons de notre nouveau
- jet plus vaste, sinon plus important, a fourni
professeur.
Un su-
une ample matière
au cours du semestre d'été, je veux parler de l'électricité, qui,
de toutes les parties de la physique, est la plus susceptible de recevoir des développements variés et étendus, tant par les théories
ingénieuses qui s’y rapportent,
que par les entreprises indusiricl-
les, qui récemment y ont puisé des ressources jusqu'alors incon.
nues. Suivant l'ordre chronologique des découvertes, M. le professeur Chautard a d'abord exposé les phénomènes de l'électricité
statique; il s’est accupé ensuite de l'analyse des expériences de
Galvani et de Volta, et de la description de l'admirable instrument qui a préludé aux grandes conquêtes de l'électricité moderne. L'exposition des lois qui régissent les courants électriques,
la production des courants sous l'influence de la chaleur et des
actions chimiques ont été le sujet de leçons pleines d'intérèt, dans
lesquelles tout en montrant le rang de la science dans l’échelle
des connaissances humaines, M. le professeur de physique en x
fait ressortir l'utilité pratique, en pénétrant avec elle dans le dé
tail des ateliers, où le génie de l'homme prend chaque jour un
nouvel essor,
ME, le professeur d'histoire naturelle a inauguré son enseigne
ment par lélude d'une des questions les plus importantes que
puisse se proposer le naturaliste, soit qu'on la considère exclusivement
dans
ses
rapports
matériels
avec
les êtres vivants, soit
qu'on l’envisage à un point de vue plus élevé, dans ses relations
2
--.
18
—
avec les doctrines philosophiques et religieuses: nous voulons
parler de la question si controversée de nos jours de la permanence des espèces, et de la production des races. Aprés avoir
établi que les espèces sauvages n'éprouvent aucun changement im-
portant sous l'influence des climats les plus divers, ni par l'action.
des autres agents extérieurs, il en a
conclu que
les espèces sau-
vage$ sont fixes et sont restées telles depuis l'origine des êtres.
Les races, soit animales, soit végétales, sont le résultat de l'actien de l'homme,
C'est en plaçant les animaux et les plantes dans
l'état de nature,
qu'il leur a donné naissance.
des conditions d'existence bien différentes de celles que leur offre
modifier à son gré,
et à des croisements
lement à parler des
faits observés chez
I} bent même
les
en les soumettant à des conditions nouvelles
rationnels. Cette étude l'a conduit naturel
races humaines, ct s'appuyant sur-tous les
les animaux ct chez les plantes, il a conclu
des principes qu'il venait d'établir l'unité de l'espèce humaine.
Passant ensuile à l'étude des différents ‘ordres de Mammifères,
il a étudié leur organisation, les modifications qu'elle éprouve
dans la série qu'embrasse celte grande classe du règne animal,
modifications toujours en rapport avec les fonctions, les mœurs,
les habitudes de ces êtres. Il a insisté sur tous les faits qui sont de
nature à jeter quelque lumière sur certaines parties de l’anatomié
et de la physiologie humaines, El a fisé enfin l'attention de son
auditoire sur les animaux utiles à l'homme, soit comme auxiliaires,
soit par les produils uliles qu'ils fournissent à l'économie domestique, à la médecine, à l’indastrie et aux arts, et sur celles dont il
pourrait faire utilement la conquête en les soumettant à la domesticité.
|
Pendant le semestre d'été, il a exposé les principes d'organographie et de physiologie végétales, et, tout en faisant connaitre
l'organisation des plantes, le mécanisme de leurs fonctions, ül
s'est surtout attaché à établir par un grand nombre de faits ces lois
admirables qui régissent les végétaux et qui font de la botanique
une vérilable science au même titre que toutes Îles autres.
Des herborisations ont eu lieu, une fois par semaine pendant
l'été, lorsque le temps l'a permis, Ces promenades scientifiques
ont fourni ainsi au professeur l'occasion de joindre à ses cours
théoriques, l'enseignement pratique de la bolanique.
—
19
—
Le cours de chimie esl le seul dont l'ouverture ait dù être re
tardée. Malgré
tout
lempressement
cipale pour l'installation provisoire
qu'a montré l'autorité manide la Faculté,
dans
un
local
qui n'était en aucune façon approprié 4 sa destination nouvelle, il
n'a pas été possible d'être prêt sur tous les points; on ne crée pas
iestantanément un
laboratoire de chimie, avec les innombrables
détails qu'il émbrasse. Privé de l'avantage d'inaugurer son enscignement en même {emps que ses collégues, M. le professeur
Nicklés, mu par le désir de se rendre utile-et de donner carrièreà
son incessante activité, a employé le semestre d'hiver à des conférences sur la chimie, faites dans le laboratoire de l'Ecole de mé-
decine, en faveur des élèves de cet établissement.
Le cours de chimic de la Faculté a commencé avecle semestre
d'été. Aprés avoir fait connaître les forces qui président aux phénomènes chimiques, et exposé les principes de la nomenclature,
M. le professeur a fait l'histoire complète des mélalloïdes et de
leurs principales combinaisons. 11 a cherché par de nombreuses
expériences, parmi lesquelles nous signalerons la solidification de
l'acide carbonique, qui, pour la premiére fois, élait obtenue à
Nancy, à vérifier el à rendre évidentes à tous les yeux les principales propriétés des corps, objets de ses leçons,
Mettre la pratique à côté de la théorie, montrer que le moindre
fait scientifique peut avoir son utilité, lelle est Pidée que M. le
professeur de chimie s'est efforcé de réaliser. Le concours obligeant de quelques chefs d'établissements industriels de Nancy lui
a été fort utile, etles visites qui ont été faites à l'usine à gaz et à
la raffinerie de salpètre, ont donné aux étudiants un premier
apercu des epérdfions chimiques exéculées en grand dans un but
économique.
M. Nicklés a consacré ses dernières leçons à l'étude de quelques
questions posées par le programme de la licence, et qui ne sont pas
développées dans les traités de chimie. Aprés avoir exposé les principes généraux de la cristallographie, il a examiné les rapports qui
existent entre la forme et la composition, et s'est attaché à pré-
ciser les cordilions dans lesquelles la forme change lorsque la com
position vient elle-même à se modifier, en opposilion avec les cir-
constances
dans lesquelles la forme reste invariable, bien que la
-
—
20
—
composition ail cessé d’être identique, Il à traité ensuite des modifications moléculaires que la matière peut éprouver, et qui, sous
les noms de dimorphisme, d'isemérie, de potymérie, d'allotropie,
ele, constituent autant d'états particuliers, aulant de corps nouveaux, qu'avec une somme
déterminée
d'éléments,
la
nature
el
souvent la science savent produire, sans rien changer dans'la pro-
portion de ces éléments ou dans leur nombre, mrais en modifiant
leur môde de groupementet par conséquent
leur forme.
L'elles.sont les matières qui ont été l'objet des leçons, pendant
l'année scolaire qui vient de s'écouler, MM. les professeurs n'ont
pas perdu de vue le but multiple que se propose l'enseignement
des Facultés des sciences. Leur
mission
n'est pas seulement de
propager d'une manière générale dans le pays le goût des hautes
études scientifiques, de féconder et de développer autour d'elles
ces germes de connaissances, qui prennent naissance dans les établissements d'instruction secondaire el qui ne sont que le premier
degré d'études plus sérieuses et plus profondes.. Elles doivent
donner un autre enseignement, indispensable aux jeunes gens,
qui se destinent à la carrière de l'instruction publique, puisqu'il
doit leur ouvrir l'abord des trois ordres de licence ès sciences, Les
* élèves des écoles de médecine réorganisées, comme Pa été celle de
Nancy, conformément au décret du 22 août 1854, réclament anssi
d'eltes les connaissances, qui leur étaient données autrefois dans
deux cours spéciaux de chimie et d'histoire naturelle, aujourd'hui
supprimés dans ces écoles, MAL. les professeurs ont dû dès-lors
diriger leur enseignement, de manière à être utile à la fois à ces
trois catégories d'auditeurs.
Mais là ne se borne pas le rôle que doit remplir
à l'avenir fa
Facullé des sciences de Nancy. Elle est appelée encore à étendre
son action, en inaugurant, dans quelques jours, un enseighement
nouveau, celui des sciences appliquées, qui est destiné à combler
une lacune {rès-importante dans notre système d'instruction publique.
Les études secondaires de nos lycées et de nos collèges ont en
jusqu'ici principalement pour objet une instruction générale, bien
propre à développer l'intelligence, à former le cœur des Jeunes
gens,à produire en eux des habitudes de travail, à les initier enfin
à toutes les connaissances
littéraires et scientifiques qui forment
la
base d’une bonne éducalion. Ces études sont de plus la préparation
indispensable
aux carrières
enseignement
nouveau.
libérales, dont
Elles
ne
sont
chacune
nécessite
pas non plus inuliles
un
pour
les carrières industrielles, qu'embrassent de nos jours un si grand
nombre de jeunes gens. Mais celles-ci, pour être parcourues avec
succès, exigent aussi des études plus complètes et surtout plus
spéciales. Aujourd’hui que l'industrie a pris parmi nous des développements
inouis,
qu'une noble
el puissante
émulation
entraine
dans cette voie les peuples civilisés el enfante toutes les merveilles
:qu'étale en ce moment l'exposition universelle, celui-là seul peut
entrer avec assurance dans celle nouvelle arène, ouverte à l'intelli-
gence de l’homme el y lutler avec avantage, qui appelle à son aide
des études scientifiques sérieuses, et qui se laisse guider par elles.
Cetie vérité a été si bien sentie, chez quelques-uns des peuples
qui nous avoisinent, que, depuis longtempsils possèdent des écoles
qui donnent les connaissances scienlifiques pratiques à un grand
nombre de jeunes gens. Si la France n'est pas entrée jusqu'ici
franchement
dans la mème
voie; si cel enseignement
n’y a jamais
été organisé d’une manière assez large, si ce n’est dans deux &iablissements privilégiés, Putilité de ces écoles nouvelles à été néan-
moins comprise. Des Lentatives ont été faites dans nos lycées et
sontencore suivies dans quelques-uns. Des écoles supérieures, où
l'on enseigne les éléments des sciences aux enfants qui se destinent
au commerce et à l'industrie, sont annexées à tous les collèges
communaux du ressort académique et comptent une populalion
d'élèves presque égale à celle qui vient y faire des études classiques. Ces écoles, excellentes comme préparation à lenseiguement supérieur des sciences appliquées, ne peuvent pas seules
donner des résullals complets, Le matériel scientifique n’y est pas
suffisant, pour permettre d'aborder avec fruit les applications pra
tiques; les élèves y sont généralement trop jeunes pour qu'il soit
possible de leur donner les connaïissaness qui dépassent le niveau
élémentaire. Ces études manquent en outre d'un stimulant indispensable,
de la perspective
d'un
contrôle
sérieux,
d’un examen
final à subir publiquement et d’un diplôme à conquérir.
Le gouvernement
de l'Empereur, qui comprend si bien les ten-
dances el les besoins de notre époque; qui s'ingénie, avec {ant de
sollicitude, à donner satisfaction à tous les intérêts, auxquels sont
allachées la gloire et la prospérité de la France, n'a pas hésité à
décider l'institution, dans nos grands centres de population,
d'écoles nouvelles fortement organisées, où les jeunes gens qui
renoncent aux carrières libérales, aujourd'hui si encombrées, et
cmbrassent les carrières industrielles
et commerciales,
viendront
puiser, non loin du toit palernel, et soustraits ainsi aux séducti®ns
de la capitale, des connaissances scientifiques indispensables pour
les parcourir avec succès et pour soutenir avec honneur notre industrie nalivnale, dans cette lutte si pacifique et si ardente, qui est’
engagée entre tous les peuples jaloux d'y maintenirleursupériorité,
De là l'origine et la nécessité des écoles de sciences appliquées,
créées par décret du 22 août 1854, et qui déjà fonctionnent régu-
Hérement sur divers points de l'empire.
A Nancy cet enseignement nouveau a êté confié aux professeurs
de nos deux Facultés, aidés du concours de MM. Morey, architecte de la ville, Léon Parisot, professeur à l'Ecole de médecine,
et Mélin, professeur des travaux graphiques au lycée impérial de
Nancy, qui ont bien voulu se dévouer à cette œuvre. Pour en faire
ressortir toute l'importance, il nous suffira d'indiquer les matières
de cet enseignement nouveau, Des cours complémentaires à ceux
déjà professés à la Faculté des sciences, comprendront la géomütrie
descriptive,
la mécanique,
les
arts
graphiques,
l'architecture,
l'hygiène, enfia la physique, la chimie et l'histoire naturelle, envisagées principalement dans leurs applications à économie domestique, à l'industrie et aux arts. Des cours spéciaux de littérature
française, d'histoire de France, de géographie commerciale et in
dustrielle, et les cours ordinaires de la Faculté des lettres, permettront aux étudiants de notre nouvelle école de compléter leurs
études litéraires.
|
Des conférences, des manipulations, des excursions scientifiques,
. dirigées par les professeurs eux-mêmes, secondés de préparateurs
instruils, babitueront
les élèves au maniement des instruments, à
la pratique des opératiins, aux études d'observation et à toutes
les recherches scientifiques utiles. La visite d’un certain nombre
de manufactures, sous là direction d'un professeur, leur fournira
_
9%
—
des notions pratiques sur les principales industries du pays. Ces
exercices établiront entre les professeurs et les éléves de fréquentes et avantageuses relations, qui offriront aux maitres l'occasion,
non-seulement de fortilier leur enseignement par des explications
nouvelles, par des interrogations répétées, mais encore leur per-
mettront de stimuler le zèle des uns et d'encourager le travail des
autres.
|
.
Après deux années, les études faites près de la Faculté, recevrout, à la suile d'un examen public, une sanction solennelle, si
l'instruction des éléves est jugéc suffisante. Ils recevront alors le
certificat de capacité pour les sciences appliquées, recommandation
puissante prés des grandes compagnies industrielles et des propriétaires de nos manufactures, qui {rouveront dans celte piéce
officielle des garanties d'intelligence, d'habitude de fravail et la
preuve de connaissances acquises. Ce certificat de capacité, comme
l'exprime avec {ant de raison, dans un document récent, le savant
membre de Finstitut, auquel est confiée l'administration de notre
Académie, deviendra pour eux, dans l’ordre des professions
industrielles, l'équivalent du baccalauréat en matière de professions
libérales.
Mais les Facultés ne sont pas seulement appelées à répandre
autour d'elles les bienfaits de l’enseignement supérieur; on esl en
droit d'attendre.plus encore du zèle de leurs membres. Le professorat, qu'ils ont conquis par des travaux sérieux, no doit pas
en marquer le terme. Pourvus ausein d’une Faculté des éléments
d'études nécessaires et des appareils indispensables aux recherches d'observation, leur entrée dans la carrière de l'enseignement
supérieur ouvre à leur activité un champ plus vaste qu'il s'agit
d'exploiter au profit de la science. Mais il n'a pas été jusqu'ici
possible aux professeurs de notre Faculté de trouver, au milieu
des embarras d’une organisation nouvelle, le calme et le temps
indispensables pour de nombreux travaux.
Toutefois, l'année qui
vient de s'écouler n'a pas été entiérement stérile sous ce rapport.
.
M. le professeur Nicklés, qui continue, dans le Journal de
pharmacie et de chimie,
la revue des travaux chimiques publiès
à l'étranger, et dans le Recueil scientifique le plus important des
—
%
—
Etats-Unis d'Amérique, la revue du mouverñent scientifique français, a produit en outre quelques
travaux originaux.
Tels sont :
4° un mémoire sur l’isomorphisme des combinaisons homologues,
dans lequel il eomplête ses anciennes observalions sur le même
sujet; 2 de nouvelles recherches sur l’aimantation, travail où il
résout par la voie de l'expérience un point théorique depuis longtemps en litige; 5° enfin, il a publié, dans le Bulletin de la société
d'encouragement de Paris, une note sur les perfectionnements
nouveaux dont sont susceptibles les électro-aimants circulaires et
trifurqués, appareils de son invention, qui ont pris.un rang distingué dans l'arsenal scientifique, et qui sont vraisemblablement
destinés à entrer bientôt dans le domaine des applications pratiques.
M. le professeur d'histoire naturelle a mis au jour le cinquième
volume de la nouvelle Flore de France, qu'il publie avec la colJaboration de M. le professeur Grenier, de la Faculté des sciences
de Besançon. Cet ouvrage, fruit de dix années de travaux, sera
prochainement complété par un sixième volume.
Les Facultés des sciences ont encore une autre mission trèsimportante à remplir, la collation des grades de bacheliér, de licencié et de docteur ès sciences. Les deux derniers n’ont pas étè
conférés celte année par Ja Faculté des sciences de Nancy. H ne
me reste dès lors qu'à vous exposer les résullats des examens pour
le baccalauréat ès sciences et à exprimer les impressions qu'ont
fait naître en nous
ces épreuves
universitaires,
relativement
au
degré d'instruction dont les candidats ont fait preuve, ol aux méthodes de préparation qu’ils emploient.
Trois sessions d'examens ont eu lieu depuis la fondation de la
Faculté.
Elles ont présenté le nombre assez considérable
de 215
candidats. Parmi eux, 118 ont été ajournés, et 97 ont été définitivement admis : 84 avec la mention assez bien; 10 avec la
mention bien el 3 seulement ont été jugés dignes du grade avec
la note très-bien. Il est facile de juger par cet exposé statistique,
que, si l'on excepte un petit nombre d'élèves qui ont fait preuve
de connaissances solides et étendues, le plus grand nombre de
ceux qui ont obtenu le diplôme, n'ont atteint que bien juste la
limile d'instruction nécessaire pour ne pas échouer. Il résnlte
——
également des
épreuves
2
subies,
—
et surtout des épreuves
les plus probantes de loutes, qu’un
se présentent à l'examen, sans
certain
avoir
nombre
terminé
de
écrites,
candidats
leurs études classi-
ques. L'impatience des jeunes gens, à échapper un peu plus tôt
à la discipline du collège, explique cette tendance fâcheuse, qui
porte une partie d’entre eux à abandonner le cours de leurs études,
précisément alors qu'elles deviendraient pour eux le plus fructueuses, et cela dans l'espoir, presque toujours déçu, d'atteindre
le but désiré au moyen d'une préparation purement artificielle, à
laquelle
se prête bien peu aujourd'hui la nature des épreuves.
La Faculté éroit être restée dans de justes limites relativement
à ses appréciations; elle n’a montré ni une sévérité décourageante,
ni une indulgence regrettable’; mais eMe croit rendre un véritable
service aux
candidats, qui abordent
suffisante, en ajournant pour eux
doit être la récompense
l'examen sans préparation
la délivrance d'un diplôme qui
d'une instruction péniblement acquise.
Jaloux de réparer un premier échec, la plupart de ces candidats,
malheureux par trop de précipitation, comprennent enfin qu'un
travail assidu peut seul les conduire au résultat qu’ils ambitionnent; de nouveaux efforts non-seulement leur permettent d'y
arriver, mais ce complément de connaissances, qui peut-être
n'eussent jamais meublé leur intelligence, qui les aideront à parcourir avec distinction la carrière qu'ils doivent embrasser, c'est
aux justes et paternelles exigences de la Faculté qu'ils en seront
redeväbles.
IMPÉRIALE.
a —
ACADÉMIE
DE
a
SÉANCE
NANCY.
e—
SOLENNELLE
DE
RENTRÉE
DES FACULTEÉS
SCIENCES ET DES LETTRES
ET
L'ÉCOLE
DE
DE MÉDECINE
DE
Le
15
ET DE PHARMACIE
NANCY
Novembre
1855.
NANCY,
GRINBLOT ET V° RAYBOIS, IMPRIMEURS-LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE NANCY,
Place Stanislas, 7, et rue Saint-Dizier, 125.
1855.
RAPPORT
M. GODRON, DOYEN DE LA FACULTÉ DES SCIENCES.
Monsecr
LE Recteur,
MESSIEURS,
La Faculté
laboratoires
des sciences venait à peine d'être constituée, ses
étaient en
construction,
ses collections
n'existaient
encore qu'en germe, qu'elle a ouvert ses cours immédiatement
après sa séance d'installation. Il y avait peut-être quelque témé-rité à inaugurer notre enseignement, sans être entourés de tous
nos moyens d'action, de ces objets d'études qui parlent aux yeux
et qui fécondent la lecon du maitre, en lui permettant à chaque
pas d'appuyer
la théorie par l'observation directe des phénomènes,
Mais nous n'avions pas trop préjugé de l'indulgence du publie
Nancéien; nous connaïssions son impatience de voir rouvrir,
aprés tant d'années de suspension, ces cours publics qui firent la
réputation de noire ancienne Université lorraine. Dés lors nous
ne pouvions pas hésiter à suivre l'impulsion qui nous était communiquée et à donner satisfaction aux désirs si légitimes de la
population.
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Ge qui nous manquait à notre début, en objets matériels d’enseignement, nous l'avons dû, en partie du moins, à l'initialive de
notre Ecole de médecine et du Lycée impérial de Naney, qui ont
mis spontanément à notre disposition leurs collections scien-
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i6
—
tifiques, el nous ont ainsi procuré les moyens de donner quelque
intérêt à nos
ment,
Je suis
premières
heureux
gratitude envers
les
de
leçons,
pouvoir
quelque
exprimer
vie à notre enscigne-
ici nos sentiments
habiles administrateurs de
de
ces deux établis-
sements, qui ont si bien compris que toutes les écoles sont sœurs,
qu'elles s'appuient
les unes
sur les autres et se complètent mu-
tuellement, enfin, qu'elies doivent rester unies par des liens étroits
de confralernité.
C’est, grâce à ces objets, qui nous
ont été confiés avec tant de
bienveillance,
nos cours. Si
rapports moins
complétement
qu'il nous a été possible d'ouvrir sans délai trois de
nous débutions dans des conditions, sous certains
favorables que celles dont jouissent les Facultés
organisées, les encouragements ne nous ont pas fait
défaut. Vous
savez tous, avec quelle assiduité les cours ont été
suivis, non-seulement au début, mais pendant l’année entière.
M. le professeur de mathématiques pures et appliquées a consacré entièrement le semestre d'hiver, et de plus une leçon par
semaine du semestre d'été, à l'étude de l'astronomie physique.
Mais, afia de ne pas négliger les candidats à la licence és sciences
mathématiques, il a dû, dans
Îe second semestre, traiter une fois
par semaine, les principales questions d'astronomie mathématique
du programme de la licence, telles que la transformation des
coordonnées sphériques, la théorie des réfractions, celle de la
parallaxe et celle de l’aberration. Ce cours a été terminé par létude de la figure mathématique du globe terrestre,
Quant à l'astronomie physique, ses principales applications à {a
mesure du temps et à la chronologie, à la géographie et à la navigation, ont été (raïlées avec détails ; enfin, les points principaux
de Ja théorie de la lune ont été également exposés. Malheureusement, ce cours si important n'a pu être complété, le temps nécessaire a manqué, et le professeur n'a pu s'occuper ni de la théorie
des planëtes et des comètes, ni des merveilles de. l'astronomie
sidérale. Sans aucun doute, le complément de ce cours réunirait
encore, dans une ville comme Nancy, cet auditoire d'élite, qui a
donné à M. le professeur d'astronomie tant de marques de sympathie. Mais les candidats aux grades universitaires réclament de
mm
17
—
li, pendant la prochaine année scolaire, deux cours de mathématiques pures el appliquées, qui doivent les conduire au but
qu'ils se proposent d'atteindre.
M. le professeur de physique a d'abord exposé les lois de la
_pesanteur et de lhydrostatique, ainsi que leurs applications principales. M. Séguin
se proposait
rique, lorsque ce jeune
d'entreprendre
l'étude
et savant professeur, que
famille attiraient si légitimement ailleurs,
du calo-
des licæs de
nous a été enlevé.
Le
cours, toutefois, n'a pas été interrompu : M. le professeur Nicklés,
auquel les sciences physiques sont aussi familiéres que les sciences chimiques, en à élé chargé, jusqu'à Parrivée de M. Chautard.
L'étude
des dilatations et des changements
d'état des corps a élè
l'objet des premières lecons de notre nouveau
- jet plus vaste, sinon plus important, a fourni
professeur.
Un su-
une ample matière
au cours du semestre d'été, je veux parler de l'électricité, qui,
de toutes les parties de la physique, est la plus susceptible de recevoir des développements variés et étendus, tant par les théories
ingénieuses qui s’y rapportent,
que par les entreprises indusiricl-
les, qui récemment y ont puisé des ressources jusqu'alors incon.
nues. Suivant l'ordre chronologique des découvertes, M. le professeur Chautard a d'abord exposé les phénomènes de l'électricité
statique; il s’est accupé ensuite de l'analyse des expériences de
Galvani et de Volta, et de la description de l'admirable instrument qui a préludé aux grandes conquêtes de l'électricité moderne. L'exposition des lois qui régissent les courants électriques,
la production des courants sous l'influence de la chaleur et des
actions chimiques ont été le sujet de leçons pleines d'intérèt, dans
lesquelles tout en montrant le rang de la science dans l’échelle
des connaissances humaines, M. le professeur de physique en x
fait ressortir l'utilité pratique, en pénétrant avec elle dans le dé
tail des ateliers, où le génie de l'homme prend chaque jour un
nouvel essor,
ME, le professeur d'histoire naturelle a inauguré son enseigne
ment par lélude d'une des questions les plus importantes que
puisse se proposer le naturaliste, soit qu'on la considère exclusivement
dans
ses
rapports
matériels
avec
les êtres vivants, soit
qu'on l’envisage à un point de vue plus élevé, dans ses relations
2
--.
18
—
avec les doctrines philosophiques et religieuses: nous voulons
parler de la question si controversée de nos jours de la permanence des espèces, et de la production des races. Aprés avoir
établi que les espèces sauvages n'éprouvent aucun changement im-
portant sous l'influence des climats les plus divers, ni par l'action.
des autres agents extérieurs, il en a
conclu que
les espèces sau-
vage$ sont fixes et sont restées telles depuis l'origine des êtres.
Les races, soit animales, soit végétales, sont le résultat de l'actien de l'homme,
C'est en plaçant les animaux et les plantes dans
l'état de nature,
qu'il leur a donné naissance.
des conditions d'existence bien différentes de celles que leur offre
modifier à son gré,
et à des croisements
lement à parler des
faits observés chez
I} bent même
les
en les soumettant à des conditions nouvelles
rationnels. Cette étude l'a conduit naturel
races humaines, ct s'appuyant sur-tous les
les animaux ct chez les plantes, il a conclu
des principes qu'il venait d'établir l'unité de l'espèce humaine.
Passant ensuile à l'étude des différents ‘ordres de Mammifères,
il a étudié leur organisation, les modifications qu'elle éprouve
dans la série qu'embrasse celte grande classe du règne animal,
modifications toujours en rapport avec les fonctions, les mœurs,
les habitudes de ces êtres. Il a insisté sur tous les faits qui sont de
nature à jeter quelque lumière sur certaines parties de l’anatomié
et de la physiologie humaines, El a fisé enfin l'attention de son
auditoire sur les animaux utiles à l'homme, soit comme auxiliaires,
soit par les produils uliles qu'ils fournissent à l'économie domestique, à la médecine, à l’indastrie et aux arts, et sur celles dont il
pourrait faire utilement la conquête en les soumettant à la domesticité.
|
Pendant le semestre d'été, il a exposé les principes d'organographie et de physiologie végétales, et, tout en faisant connaitre
l'organisation des plantes, le mécanisme de leurs fonctions, ül
s'est surtout attaché à établir par un grand nombre de faits ces lois
admirables qui régissent les végétaux et qui font de la botanique
une vérilable science au même titre que toutes Îles autres.
Des herborisations ont eu lieu, une fois par semaine pendant
l'été, lorsque le temps l'a permis, Ces promenades scientifiques
ont fourni ainsi au professeur l'occasion de joindre à ses cours
théoriques, l'enseignement pratique de la bolanique.
—
19
—
Le cours de chimie esl le seul dont l'ouverture ait dù être re
tardée. Malgré
tout
lempressement
cipale pour l'installation provisoire
qu'a montré l'autorité manide la Faculté,
dans
un
local
qui n'était en aucune façon approprié 4 sa destination nouvelle, il
n'a pas été possible d'être prêt sur tous les points; on ne crée pas
iestantanément un
laboratoire de chimie, avec les innombrables
détails qu'il émbrasse. Privé de l'avantage d'inaugurer son enscignement en même {emps que ses collégues, M. le professeur
Nicklés, mu par le désir de se rendre utile-et de donner carrièreà
son incessante activité, a employé le semestre d'hiver à des conférences sur la chimie, faites dans le laboratoire de l'Ecole de mé-
decine, en faveur des élèves de cet établissement.
Le cours de chimic de la Faculté a commencé avecle semestre
d'été. Aprés avoir fait connaître les forces qui président aux phénomènes chimiques, et exposé les principes de la nomenclature,
M. le professeur a fait l'histoire complète des mélalloïdes et de
leurs principales combinaisons. 11 a cherché par de nombreuses
expériences, parmi lesquelles nous signalerons la solidification de
l'acide carbonique, qui, pour la premiére fois, élait obtenue à
Nancy, à vérifier el à rendre évidentes à tous les yeux les principales propriétés des corps, objets de ses leçons,
Mettre la pratique à côté de la théorie, montrer que le moindre
fait scientifique peut avoir son utilité, lelle est Pidée que M. le
professeur de chimie s'est efforcé de réaliser. Le concours obligeant de quelques chefs d'établissements industriels de Nancy lui
a été fort utile, etles visites qui ont été faites à l'usine à gaz et à
la raffinerie de salpètre, ont donné aux étudiants un premier
apercu des epérdfions chimiques exéculées en grand dans un but
économique.
M. Nicklés a consacré ses dernières leçons à l'étude de quelques
questions posées par le programme de la licence, et qui ne sont pas
développées dans les traités de chimie. Aprés avoir exposé les principes généraux de la cristallographie, il a examiné les rapports qui
existent entre la forme et la composition, et s'est attaché à pré-
ciser les cordilions dans lesquelles la forme change lorsque la com
position vient elle-même à se modifier, en opposilion avec les cir-
constances
dans lesquelles la forme reste invariable, bien que la
-
—
20
—
composition ail cessé d’être identique, Il à traité ensuite des modifications moléculaires que la matière peut éprouver, et qui, sous
les noms de dimorphisme, d'isemérie, de potymérie, d'allotropie,
ele, constituent autant d'états particuliers, aulant de corps nouveaux, qu'avec une somme
déterminée
d'éléments,
la
nature
el
souvent la science savent produire, sans rien changer dans'la pro-
portion de ces éléments ou dans leur nombre, mrais en modifiant
leur môde de groupementet par conséquent
leur forme.
L'elles.sont les matières qui ont été l'objet des leçons, pendant
l'année scolaire qui vient de s'écouler, MM. les professeurs n'ont
pas perdu de vue le but multiple que se propose l'enseignement
des Facultés des sciences. Leur
mission
n'est pas seulement de
propager d'une manière générale dans le pays le goût des hautes
études scientifiques, de féconder et de développer autour d'elles
ces germes de connaissances, qui prennent naissance dans les établissements d'instruction secondaire el qui ne sont que le premier
degré d'études plus sérieuses et plus profondes.. Elles doivent
donner un autre enseignement, indispensable aux jeunes gens,
qui se destinent à la carrière de l'instruction publique, puisqu'il
doit leur ouvrir l'abord des trois ordres de licence ès sciences, Les
* élèves des écoles de médecine réorganisées, comme Pa été celle de
Nancy, conformément au décret du 22 août 1854, réclament anssi
d'eltes les connaissances, qui leur étaient données autrefois dans
deux cours spéciaux de chimie et d'histoire naturelle, aujourd'hui
supprimés dans ces écoles, MAL. les professeurs ont dû dès-lors
diriger leur enseignement, de manière à être utile à la fois à ces
trois catégories d'auditeurs.
Mais là ne se borne pas le rôle que doit remplir
à l'avenir fa
Facullé des sciences de Nancy. Elle est appelée encore à étendre
son action, en inaugurant, dans quelques jours, un enseighement
nouveau, celui des sciences appliquées, qui est destiné à combler
une lacune {rès-importante dans notre système d'instruction publique.
Les études secondaires de nos lycées et de nos collèges ont en
jusqu'ici principalement pour objet une instruction générale, bien
propre à développer l'intelligence, à former le cœur des Jeunes
gens,à produire en eux des habitudes de travail, à les initier enfin
à toutes les connaissances
littéraires et scientifiques qui forment
la
base d’une bonne éducalion. Ces études sont de plus la préparation
indispensable
aux carrières
enseignement
nouveau.
libérales, dont
Elles
ne
sont
chacune
nécessite
pas non plus inuliles
un
pour
les carrières industrielles, qu'embrassent de nos jours un si grand
nombre de jeunes gens. Mais celles-ci, pour être parcourues avec
succès, exigent aussi des études plus complètes et surtout plus
spéciales. Aujourd’hui que l'industrie a pris parmi nous des développements
inouis,
qu'une noble
el puissante
émulation
entraine
dans cette voie les peuples civilisés el enfante toutes les merveilles
:qu'étale en ce moment l'exposition universelle, celui-là seul peut
entrer avec assurance dans celle nouvelle arène, ouverte à l'intelli-
gence de l’homme el y lutler avec avantage, qui appelle à son aide
des études scientifiques sérieuses, et qui se laisse guider par elles.
Cetie vérité a été si bien sentie, chez quelques-uns des peuples
qui nous avoisinent, que, depuis longtempsils possèdent des écoles
qui donnent les connaissances scienlifiques pratiques à un grand
nombre de jeunes gens. Si la France n'est pas entrée jusqu'ici
franchement
dans la mème
voie; si cel enseignement
n’y a jamais
été organisé d’une manière assez large, si ce n’est dans deux &iablissements privilégiés, Putilité de ces écoles nouvelles à été néan-
moins comprise. Des Lentatives ont été faites dans nos lycées et
sontencore suivies dans quelques-uns. Des écoles supérieures, où
l'on enseigne les éléments des sciences aux enfants qui se destinent
au commerce et à l'industrie, sont annexées à tous les collèges
communaux du ressort académique et comptent une populalion
d'élèves presque égale à celle qui vient y faire des études classiques. Ces écoles, excellentes comme préparation à lenseiguement supérieur des sciences appliquées, ne peuvent pas seules
donner des résullals complets, Le matériel scientifique n’y est pas
suffisant, pour permettre d'aborder avec fruit les applications pra
tiques; les élèves y sont généralement trop jeunes pour qu'il soit
possible de leur donner les connaïissaness qui dépassent le niveau
élémentaire. Ces études manquent en outre d'un stimulant indispensable,
de la perspective
d'un
contrôle
sérieux,
d’un examen
final à subir publiquement et d’un diplôme à conquérir.
Le gouvernement
de l'Empereur, qui comprend si bien les ten-
dances el les besoins de notre époque; qui s'ingénie, avec {ant de
sollicitude, à donner satisfaction à tous les intérêts, auxquels sont
allachées la gloire et la prospérité de la France, n'a pas hésité à
décider l'institution, dans nos grands centres de population,
d'écoles nouvelles fortement organisées, où les jeunes gens qui
renoncent aux carrières libérales, aujourd'hui si encombrées, et
cmbrassent les carrières industrielles
et commerciales,
viendront
puiser, non loin du toit palernel, et soustraits ainsi aux séducti®ns
de la capitale, des connaissances scientifiques indispensables pour
les parcourir avec succès et pour soutenir avec honneur notre industrie nalivnale, dans cette lutte si pacifique et si ardente, qui est’
engagée entre tous les peuples jaloux d'y maintenirleursupériorité,
De là l'origine et la nécessité des écoles de sciences appliquées,
créées par décret du 22 août 1854, et qui déjà fonctionnent régu-
Hérement sur divers points de l'empire.
A Nancy cet enseignement nouveau a êté confié aux professeurs
de nos deux Facultés, aidés du concours de MM. Morey, architecte de la ville, Léon Parisot, professeur à l'Ecole de médecine,
et Mélin, professeur des travaux graphiques au lycée impérial de
Nancy, qui ont bien voulu se dévouer à cette œuvre. Pour en faire
ressortir toute l'importance, il nous suffira d'indiquer les matières
de cet enseignement nouveau, Des cours complémentaires à ceux
déjà professés à la Faculté des sciences, comprendront la géomütrie
descriptive,
la mécanique,
les
arts
graphiques,
l'architecture,
l'hygiène, enfia la physique, la chimie et l'histoire naturelle, envisagées principalement dans leurs applications à économie domestique, à l'industrie et aux arts. Des cours spéciaux de littérature
française, d'histoire de France, de géographie commerciale et in
dustrielle, et les cours ordinaires de la Faculté des lettres, permettront aux étudiants de notre nouvelle école de compléter leurs
études litéraires.
|
Des conférences, des manipulations, des excursions scientifiques,
. dirigées par les professeurs eux-mêmes, secondés de préparateurs
instruils, babitueront
les élèves au maniement des instruments, à
la pratique des opératiins, aux études d'observation et à toutes
les recherches scientifiques utiles. La visite d’un certain nombre
de manufactures, sous là direction d'un professeur, leur fournira
_
9%
—
des notions pratiques sur les principales industries du pays. Ces
exercices établiront entre les professeurs et les éléves de fréquentes et avantageuses relations, qui offriront aux maitres l'occasion,
non-seulement de fortilier leur enseignement par des explications
nouvelles, par des interrogations répétées, mais encore leur per-
mettront de stimuler le zèle des uns et d'encourager le travail des
autres.
|
.
Après deux années, les études faites près de la Faculté, recevrout, à la suile d'un examen public, une sanction solennelle, si
l'instruction des éléves est jugéc suffisante. Ils recevront alors le
certificat de capacité pour les sciences appliquées, recommandation
puissante prés des grandes compagnies industrielles et des propriétaires de nos manufactures, qui {rouveront dans celte piéce
officielle des garanties d'intelligence, d'habitude de fravail et la
preuve de connaissances acquises. Ce certificat de capacité, comme
l'exprime avec {ant de raison, dans un document récent, le savant
membre de Finstitut, auquel est confiée l'administration de notre
Académie, deviendra pour eux, dans l’ordre des professions
industrielles, l'équivalent du baccalauréat en matière de professions
libérales.
Mais les Facultés ne sont pas seulement appelées à répandre
autour d'elles les bienfaits de l’enseignement supérieur; on esl en
droit d'attendre.plus encore du zèle de leurs membres. Le professorat, qu'ils ont conquis par des travaux sérieux, no doit pas
en marquer le terme. Pourvus ausein d’une Faculté des éléments
d'études nécessaires et des appareils indispensables aux recherches d'observation, leur entrée dans la carrière de l'enseignement
supérieur ouvre à leur activité un champ plus vaste qu'il s'agit
d'exploiter au profit de la science. Mais il n'a pas été jusqu'ici
possible aux professeurs de notre Faculté de trouver, au milieu
des embarras d’une organisation nouvelle, le calme et le temps
indispensables pour de nombreux travaux.
Toutefois, l'année qui
vient de s'écouler n'a pas été entiérement stérile sous ce rapport.
.
M. le professeur Nicklés, qui continue, dans le Journal de
pharmacie et de chimie,
la revue des travaux chimiques publiès
à l'étranger, et dans le Recueil scientifique le plus important des
—
%
—
Etats-Unis d'Amérique, la revue du mouverñent scientifique français, a produit en outre quelques
travaux originaux.
Tels sont :
4° un mémoire sur l’isomorphisme des combinaisons homologues,
dans lequel il eomplête ses anciennes observalions sur le même
sujet; 2 de nouvelles recherches sur l’aimantation, travail où il
résout par la voie de l'expérience un point théorique depuis longtemps en litige; 5° enfin, il a publié, dans le Bulletin de la société
d'encouragement de Paris, une note sur les perfectionnements
nouveaux dont sont susceptibles les électro-aimants circulaires et
trifurqués, appareils de son invention, qui ont pris.un rang distingué dans l'arsenal scientifique, et qui sont vraisemblablement
destinés à entrer bientôt dans le domaine des applications pratiques.
M. le professeur d'histoire naturelle a mis au jour le cinquième
volume de la nouvelle Flore de France, qu'il publie avec la colJaboration de M. le professeur Grenier, de la Faculté des sciences
de Besançon. Cet ouvrage, fruit de dix années de travaux, sera
prochainement complété par un sixième volume.
Les Facultés des sciences ont encore une autre mission trèsimportante à remplir, la collation des grades de bacheliér, de licencié et de docteur ès sciences. Les deux derniers n’ont pas étè
conférés celte année par Ja Faculté des sciences de Nancy. H ne
me reste dès lors qu'à vous exposer les résullats des examens pour
le baccalauréat ès sciences et à exprimer les impressions qu'ont
fait naître en nous
ces épreuves
universitaires,
relativement
au
degré d'instruction dont les candidats ont fait preuve, ol aux méthodes de préparation qu’ils emploient.
Trois sessions d'examens ont eu lieu depuis la fondation de la
Faculté.
Elles ont présenté le nombre assez considérable
de 215
candidats. Parmi eux, 118 ont été ajournés, et 97 ont été définitivement admis : 84 avec la mention assez bien; 10 avec la
mention bien el 3 seulement ont été jugés dignes du grade avec
la note très-bien. Il est facile de juger par cet exposé statistique,
que, si l'on excepte un petit nombre d'élèves qui ont fait preuve
de connaissances solides et étendues, le plus grand nombre de
ceux qui ont obtenu le diplôme, n'ont atteint que bien juste la
limile d'instruction nécessaire pour ne pas échouer. Il résnlte
——
également des
épreuves
2
subies,
—
et surtout des épreuves
les plus probantes de loutes, qu’un
se présentent à l'examen, sans
certain
avoir
nombre
terminé
de
écrites,
candidats
leurs études classi-
ques. L'impatience des jeunes gens, à échapper un peu plus tôt
à la discipline du collège, explique cette tendance fâcheuse, qui
porte une partie d’entre eux à abandonner le cours de leurs études,
précisément alors qu'elles deviendraient pour eux le plus fructueuses, et cela dans l'espoir, presque toujours déçu, d'atteindre
le but désiré au moyen d'une préparation purement artificielle, à
laquelle
se prête bien peu aujourd'hui la nature des épreuves.
La Faculté éroit être restée dans de justes limites relativement
à ses appréciations; elle n’a montré ni une sévérité décourageante,
ni une indulgence regrettable’; mais eMe croit rendre un véritable
service aux
candidats, qui abordent
suffisante, en ajournant pour eux
doit être la récompense
l'examen sans préparation
la délivrance d'un diplôme qui
d'une instruction péniblement acquise.
Jaloux de réparer un premier échec, la plupart de ces candidats,
malheureux par trop de précipitation, comprennent enfin qu'un
travail assidu peut seul les conduire au résultat qu’ils ambitionnent; de nouveaux efforts non-seulement leur permettent d'y
arriver, mais ce complément de connaissances, qui peut-être
n'eussent jamais meublé leur intelligence, qui les aideront à parcourir avec distinction la carrière qu'ils doivent embrasser, c'est
aux justes et paternelles exigences de la Faculté qu'ils en seront
redeväbles.
Fichiers
seance_rentree_1855_3.pdf, application/pdf, 528,96 Ko,
Classe
Partie du document
GODRON, Dominique-Alexandre. Rapport de M. Godron, Doyen de la Faculté des sciences. https://histoire-universite-nancy.fr/s/una2gm/item/8622, accès le 17 mai 2022