Amédée PARAF

1861, 1911
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Amédée
Paraf
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Mathématiques
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Texte
; par :
Laurent Rollet

Amédée PARAF (1861-1911)

Maître de conférences de mathématiques

Amédée Paraf est né le 28 octobre 1861 à Mulhouse dans une famille de la bourgeoisie juive. Son père, Benjamin Paraf (1810-1869), est négociant ; sa mère, Hélène Aron (1821-1891), est la fille d’un commerçant de Soultz-sous-Forêts. Amédée Paraf est l’avant-dernier des onze enfants du couple. Célibataire, il meurt à Toulouse à l’âge de 50 ans, sans descendant. Il est inhumé au cimetière Montparnasse, à Paris.

Après la guerre de 1870, la famille Paraf opte pour la nationalité française et s’installe à Épinal. Paraf commence sa scolarité au collège de la ville, puis il part poursuivre ses études au lycée Louis-Le-Grand à Paris. Il passe le baccalauréat ès lettres puis, 1879-1880, il entre en classe de mathématiques élémentaires où il suit les cours de Charles Simon. Il y obtient plusieurs prix ; candidat au concours général, il obtient également des accessits en mathématiques et en chimie. L’année suivante, il entre dans la classe de mathématiques spéciales où il suit les cours de Boleslas Niewenglowski. Il remporte également de nombreux prix et, surtout, réussit les concours de l’École polytechnique (avec le 60e rang) et de l’École normale supérieure (6e rang). Il choisit la seconde école ; la démission de certains élèves optant pour l’École polytechnique lui permet d’entrer avec le 3e rang. Parmi ses camarades de promotion, on compte les mathématiciens Charles Bioche, Henri Andoyer et Henry Vogt*. Il passe avec succès les licences de mathématiques et de physique puis, en 1884, il obtient l’agrégation de mathématiques avec le second rang. La logique voudrait qu’il soit affecté dans un établissement d’enseignement secondaire en province, mais, se destinant à une carrière dans l’enseignement supérieur, il demande en octobre 1884 l’autorisation de rester une année supplémentaire dans l’école afin de préparer une thèse de doctorat. L’année suivante, il obtient un poste d’agrégé-préparateur, toujours à l’École normale supérieure, ce qui lui permet de continuer à travailler sur sa thèse tout en s’occupant de la bibliothèque des sciences de l’école. Malgré cette situation privilégiée, Paraf mettra près de 8 ans pour terminer son doctorat.

En août 1886, il est nommé maître de conférences à la Faculté des sciences de Nancy en remplacement d’Eugène Fabry*, qui vient d’être nommé à Montpellier. On lui confie des enseignements de mécanique et d’astronomie ainsi que la préparation des candidats à l’agrégation. Paraf s’intègre bien à Nancy, où il retrouve plusieurs anciens élèves de l’École normale supérieure. Il se lie également d’amitié avec le germaniste Henri Lichtenberger qui est alors maître de conférences de littérature étrangère à la faculté des lettres. Originaire de Mulhouse, Lichtenberger partage avec Paraf le même goût pour la musique. Ils fréquentent tous deux les soirées musicales organisées dans les salons bourgeois de la ville, jouent du piano et de l’orgue, passent leurs vacances ensemble, se rendant même au festival de Bayreuth créé par Richard Wagner en 1876. En 1891, les autorités universitaires nancéiennes considèrent Paraf très favorablement et voient en lui un candidat légitime à une chaire de mathématiques. Le recteur écrit ainsi : « M. Paraf est très goûté des élèves auxquels il fait un excellent cours. Tout fait espérer qu’il sera Docteur à la fin de l’année et que la Faculté pourra le conserver ». Malheureusement, il ne parvient pas à terminer sa thèse dans les temps et il est contraint de quitter son poste à Nancy ; il est alors remplacé par Wladimir de Tannenberg*. En novembre 1891, Paraf obtient donc un congé d’inactivité pour terminer son doctorat ; il quitte Nancy pour rejoindre sa famille à Paris.

Quelques mois plus tard, il soutient sa thèse à la Sorbonne devant un jury composé des mathématiciens Charles Hermite, Gaston Darboux, Émile Picard et Henri Poincaré (ces deux derniers en tant qu’assesseurs). Cette thèse porte sur le problème de Dirichlet. Paraf s’inscrit dans la continuité des travaux d’Henri Poincaré sur ce sujet. Celui-ci avait proposé une méthode de résolution nouvelle de ce problème pour trois variables. La thèse de Paraf reprend avec succès cette méthode en la modifiant pour qu’elle s’applique au problème à deux variables. Ce travail est salué unanimement par le jury. Hermite écrit dans un court rapport : « La thèse de M. Paraf qui a pour objet une question importante et difficile, montre un talent mathématique très distingué et compte parmi les meilleures qui aient été présentées à la faculté. Nous avons adressé nos éloges au candidat pour sa thèse écrite et pour sa thèse orale, en le recevant docteur toutes boules blanches ». Le rapport d’Émile Picard souligne, de son côté, que le sujet très général étudié par l’auteur « est une garantie de ses connaissances mathématiques ».

Conséquence de ce succès, en novembre 1892, Paraf est nommé maître de conférences de mathématiques à la Faculté des sciences de Toulouse : il y remplace son camarade de promotion Henri Andoyer, nommé maître de conférences de mécanique céleste à la Faculté des sciences de Paris. Malgré des rapports d’évaluation très élogieux, Paraf attendra sa titularisation comme professeur durant de nombreuses années, sans doute en raison de son manque d’activité scientifique. Ainsi dès 1893, le doyen de la Faculté des sciences de Toulouse, Benjamin Baillaud, remarque dans un rapport : « Santé peu solide. C’est assurément à ce motif qu’il faut attribuer le manque apparent d’activité scientifique. Les quatre leçons que M. Paraf a faites dans l’année étaient pour lui un trop lourd fardeau ». De fait, durant toute sa carrière, Paraf ne publiera que sa thèse, consacrant l’essentiel de son temps à son enseignement, jugé d’ailleurs de très grande qualité par ses supérieurs. En mai 1897, Paraf est nommé professeur adjoint, un grade honorifique récompensant son engagement pédagogique. L’année suivante, il est promu officier de l’Instruction publique.

Il est finalement nommé professeur à la faveur de la création à Toulouse d’une chaire de mécanique générale en novembre 1907. À sa demande, il obtient que celle-ci soit transformée en chaire de mécanique rationnelle en mars 1909, suite au décès de son titulaire Alphonse Legoux. Adolphe Bühl, qui est alors chargé du cours de mécanique, accepte de voir son enseignement redirigé vers les mathématiques générales. Paraf meurt deux ans plus tard, terrassé par une « fièvre maligne ». La notice nécrologique que lui consacre L’enseignement mathématique en 1911 résume assez bien son parcours de carrière : « Paraf se dépensait dans plusieurs domaines différents. Il exerçait une action féconde sur les étudiants qui fréquentaient ses cours. Son enseignement clair, précis et élégant séduisait les esprits que tentait une étude approfondie de la mécanique. Il était aussi un musicien de valeur. La multiplicité même de ses aptitudes ne lui a peut-être pas permis de réaliser un grand travail mathématique ; cependant ses recherches sur le problème de Dirichlet ont été classiques à une époque où les méthodes de Fredholm n’avaient pas tout envahi. Tous les lecteurs du Traité d’Analyse de M. E. Picard savent le cas que ce dernier fait, en de nombreuses citations, des travaux de Paraf. »

Laurent Rollet

Bibliographie

Paraf Amédée (1892), Sur le problème de Dirichlet et son extension au cas de l’équation linéaire générale du second ordre, thèse de doctorat de mathématiques, Paris, Gauthier-Villars. Également publié en deux parties dans les Annales de la Faculté des sciences de Toulouse, 1892, p. 1-75.

___ (1888), « Sur deux théorèmes de Jacobi relatifs aux lignes géodésiques », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 106, 1139-1141.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/23457).

Sources secondaires

Bühl, Adolphe & Turrière, E. (1911), « Notice nécrologique sur Amédée Paraf », L’enseignement mathématique, 151-152.

Dürrbach F. (1911), « Notice nécrologique sur Amédée Paraf », Annuaire de l’École normale supérieure, 93-96.

Brasseur, Roland (2014), « Notice sur Amédée Paraf », Les mathématiciens inhumés au cimetière de Montparnasse.

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Photographie d'Amédée Paraf élève à l’École normale supérieure Image