Eugène NOËL

1875, 1941
;
Eugène
Noël
;
Mécanique
;
Texte
; par :
Étienne Bolmont

Eugène NOËL (1875-1941)

Chargé de conférences de mécanique

Marie Louis Eugène Noël est né à Nancy le 26 septembre 1875. Son père est mécanicien. En octobre 1908, Eugène épouse Emma Berthe Gieringer (1884-1940). Ils ont deux enfants, Henri Paul, né en octobre 1911 et Eugène Pierre en février 1913.

À la fin de ses études secondaires au lycée de Nancy, il devient bachelier ès lettres en 1891 puis ès sciences en 1892. Il est admis à l’École normale supérieure en 1896, et il y entre en novembre 1897, après son année de service militaire. Il y acquiert les certificats de calcul différentiel et intégral (1898), de Physique (1899), de botanique (1899), de zoologie (1900) et de géologie (1901). Il sort de l’École normale supérieure en 1901 avec le seul titre d’ancien élève, sans pouvoir passer l’agrégation, à cause d’une maladie des yeux dont il souffrira toute sa vie : ayant perdu un œil vers 25 ans, il est réformé n° 2 en 1902 pour cette raison, réforme renouvelée en 1914 ; il devra clore sa vie professionnelle plus tôt que prévu en 1930. Sa formation lui permet cependant de postuler pour des postes d’enseignant en sciences naturelles et en sciences physiques. En août 1902, il sollicite un poste à Remiremont ou dans un autre collège proche des Vosges où il compte faire des recherches géologiques. À défaut, il accepterait un poste à Longwy ou dans une académie voisine, mais il lui faut éviter le Midi, certainement à cause de la luminosité de son climat. Il est ainsi nommé au collège d’Épinal comme délégué d’enseignement de sciences naturelles en novembre 1902. Il n’y reste cependant qu’un trimestre, avec un contact difficile avec l’enseignement : sa mauvaise vue altère son autorité et la discipline s’en ressent. Il interrompt cette première expérience d’abord par congé de maladie de 4 mois, il a une inflammation de l’iris, puis il prend un congé d’inactivité jusqu’en septembre 1904. Il consacre ce congé à préparer et réussir son diplôme d’ingénieur électricien de l’Institut électrotechnique de la Faculté des sciences de Nancy, ajoutant une nouvelle corde à son arc en juillet 1904. Parallèlement, dès 1902, il commence des travaux en vue d’une thèse de géologie avec le professeur René Nicklès*. Il est inscrit comme étudiant en doctorat de 1902 à 1907. Il participe à des enquêtes et à des études sur les eaux en instance de captage dans de nombreuses communes de Lorraine et de Haute-Marne. C’est la géologie qui va orienter son parcours dans les années suivantes : durant la période 1904-1907, il entre dans l’industrie en tant que conseil des Salines de Rosières à Varangéville ; il y joue un rôle d’expert dans un procès entre exploitations voisines d’eau salée. Dans la même période, il est aussi embauché comme ingénieur géologue à la Société des charbonnages réunis où il collabore aux dernières recherches de houille en Lorraine, en 1905 et 1906. De 1907 à 1909, il part en Tunisie en mission hydrogéologique pour la direction des travaux publics du Gouvernement tunisien. Il travaille à une publication de ses résultats et y retourne en 1912.

En mai et juin 1915, Noël est chargé de conférences de mécanique à l’Institut agricole et colonial de la Faculté des sciences de Nancy, où il donne un enseignement sur les moteurs utilisables dans l’agriculture. Son bref passage à la faculté des sciences lui laisse entrevoir la possibilité d’un poste dans l’enseignement à Nancy, mais cela ne se réalise pas à cause du retour d’un réformé pour blessures de guerre, prioritaire sur le poste. Il se réclamera cependant souvent de l’appui du doyen Gaston Floquet*, de René Nicklès* et du directeur de l’Institut électrotechnique Henry Vogt*.

Il postule en vain dans l’académie de Montpellier pour un poste de physique ou de sciences naturelles dans un collège. Finalement, en mars 1916, il est nommé délégué d’enseignement des sciences naturelles au collège de Sillé-le-Guillaume dans la Sarthe. Il y reste jusqu’en septembre 1919. Il revient dans l’Est en octobre 1919, d’abord affecté à Saint-Claude dans le Jura en remplacement d’un enseignant de lettres et grammaire, puis officiellement nommé au collège d’Altkirch dans le Haut-Rhin. Il y est délégué d’enseignement de sciences naturelles jusqu’au 13 février 1923, date à laquelle il est enfin nommé professeur de sciences naturelles au même collège. Il le reste jusque fin mars 1930. Le 1er avril 1930, il accède à la retraite de façon anticipée, en avançant l’argument de sa vue qui se détériore de plus en plus.

Après son expérience malheureuse à Épinal, sa carrière d’enseignant débute donc effectivement en 1916. Son savoir est reconnu par l’inspecteur d’Académie, « il peut donner un enseignement solide », mais le recteur de Caen souligne son manque d’autorité et son manque d’aptitudes pédagogiques. À Altkirch, le recteur de Colmar ne peut cependant que reconnaître que ses élèves ont de bons résultats et souligne de réelles qualités pédagogiques et sa conscience professionnelle. En 1926, l’inspecteur général Émile Blutel le visite dans une classe de mathématiques de deux élèves !

Son rapport n’est pas bon, mais il conclut : « Je n’ai pourtant pas recueilli de réserves au sujet des résultats obtenus ». En 1927, la contradiction apparaît dans les rapports de l’inspecteur d’académie et du recteur, clarté et compétence pour le premier, rudesse et sans netteté suffisante de l’autre. La même année, le rapport d’inspection souligne une certaine originalité de son enseignement : Noël fait un « exposé animé, pittoresque », illustré d’exemples de l’industrie, fait de petites expériences « avec facilité, virtuosité même ». Dans la conclusion, l’inspecteur général Arthur Tresse rappelle son cursus « curieux », et lui propose un poste « plus important » à l’Université qui pourrait mieux exploiter ses valeurs, sa compétence d’ingénieur géologue et ses attaches avec le milieu industriel. Noël est tenté, il accepterait un poste à Mulhouse ou Belfort.

En 1928, l’inspecteur général Blutel souligne : « Il est intéressant dans sa fantaisie ». « Par les questions qu’il leur pose [aux élèves], par la forme plaisante parfois de ses observations, il contribue sûrement au développement de leur sens critique. Il est plus apte à provoquer l’effort qu’à le diriger, à exciter l’attention qu’à la concentrer et à la fixer. Ce n’est pas un professeur banal. » Finalement, Eugène Noël avait une démarche pédagogique moderne, assez en accord avec les idées novatrices d’Émile Blutel. En mars 1929, la dernière inspection est effectuée par Jean-Baptiste Lamirand qui souligne les faiblesses d’Eugène Noël, en concluant « un homme peu heureux ».

En février 1930, la commission de réforme des retraites le déclare dans l’impossibilité de continuer ses fonctions. Il prend sa retraite le 1er avril 1930 et revient s’installer à Nancy, ses deux fils étant inscrits l’un à l’École professionnelle de l’Est et l’autre à l’École supérieure de commerce. Après le décès de son épouse le 23 mars 1940 à Nancy il quitte définitivement la Lorraine pour Limoges où il décède le 20 septembre 1941.

Eugène Noël est membre de la Société des sciences de Nancy depuis 1905. Il y publie quelques articles, souvent repris de communications à l’Académie des sciences.

Étienne Bolmont

Bibliographie

Noël Eugène (1904), « Sur la faune des lydiennes du grès vosgien », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 138, 1531.

___ (1905), « Note sur l’orientation des galets dans un courant et la direction des courants en quelques points du grès vosgien », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 84.

___ (1905), « Note sur la faune des galets du grès vosgien », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 3, 46-73.

___ (1905), « Sur l’orientation que prend un corps allongé pouvant rouler sur ls fonds dans un courant liquide », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 141, 968.

___ (1906), « Note sur la détermination du courant qui a amené les éléments d’un conglomérat », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 2, 143.

___ (1907), « Note sur l’usure des corps ronds et en particulier des galets », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 1-3, 197.

___ (1909), « Note sur l’hydrogéologie tunisienne », Bulletin de la Société géologique de France, 459-487.

___ (1910), « sur la surface libre d’une nappe aquifère sur une prévision de débit de source (Zaghouan) », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 1-3, 97.

___ (1910), « Les infiltrations sur le massif du Zaghouan (Tunisie) », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 150, 1711.

___ (1911), « Infiltrations et sources dans la dorsale tunisienne », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 1-4, 170.

___ (1913), « Sur la nature des forces agissant sur la baguette et le pendule des sourciers », Bulletin de la Société des sciences de Nancy, 1-3, 355-374.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/24160).