Charles MILLOT

1847, 1933
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Charles
Millot
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Météorologie
;
Texte
; par :
Laurent Rollet

Charles MILLOT (1847-1933)

Chargé de cours de météorologie

Charles Millot est né à Nancy le 22 septembre 1847. Il est le fils de François Millot, qui exerce la profession d’épicier à Nancy, et de Catherine Vincenot. Charles Millot est veuf en première noce de Marie Catherine Streiff (1854-1924), elle aussi fille d’un épicier de Nancy. En octobre 1925, il se remarie à Nancy avec Alice Élise Chehet (1873-1960), fille d’un mécanicien aux chemins de fer, dont il n’aura pas d’enfant. Il décède à Nancy le 29 avril 1933.

Après son baccalauréat et un passage en classe préparatoire au lycée de Nancy, il entre à l’École navale en 1864. Commence alors la première partie de sa carrière, comme officier de marine. Après plusieurs années avec le grade d’aspirant, il est promu enseigne de vaisseau en 1869, puis lieutenant de vaisseau en 1878.

Durant ces années, il voyage sans doute beaucoup et son port d’attache semble être celui de Toulon. En 1878, il démissionne de l’armée pour des raisons inconnues et il est versé dans la réserve, où il reste jusqu’en 1895 (toujours attaché au port de Toulon). Il se rapproche alors de Nancy et de ses institutions scientifiques et commence la deuxième partie de sa carrière.

On le retrouve en effet la même année comme secrétaire de la Commission météorologique de Meurthe-et-Moselle. On peut supposer que son parcours militaire l’a bien préparé à ces responsabilités et à l’enseignement de la météorologie dont il va faire sa spécialité. En mars 1883, il est nommé chargé de travaux de météorologie à la Faculté des sciences de Nancy et l’année suivante, en août, on lui confie la charge d’un cours d’observations météorologiques. Il est chef de travaux météorologiques de 1884 à 1899 puis chargé du cours complémentaire de météorologie. Parallèlement, il donne des conférences régulières de météorologie et de climatologie à destination des candidats à la licence et à l’agrégation. Il y traite des questions relatives à la physique du globe et des applications de la météorologie à la prévision du temps. Selon Charles Adam, il devient très vite la « cheville ouvrière » de cette discipline.

En 1883 il crée un Service de météorologie à la faculté des sciences grâce à des financements de l’État, de la ville de Nancy et du département. Celui-ci est situé en dehors de la faculté et comprend un observatoire météorologique bien équipé. La gestion quotidienne de ce service, qu’il semble assurer à titre gratuit, représente sans doute un travail considérable, d’autant plus que Millot devient par ailleurs membre de la Commission météorologique départementale.

Son enseignement et son investissement à la faculté semblent faire l’unanimité. Les rapports annuels des recteurs et des doyens se félicitent régulièrement de pouvoir bénéficier de ses talents. En 1906, Charles Adam écrit que Millot propose un enseignement très spécialisé où personne ne pourra le remplacer et il ajoute qu’une installation lui sera réservée dans le nouvel Institut de physique alors en voie d’achèvement en vieille ville de Nancy. De manière récurrente on demande que son traitement annuel de 2 000 francs soit augmenté, sans succès. En 1908, Millot demande à faire valoir ses droits à la retraite pour raisons de santé. L’annonce de son départ suscite des réactions véhémentes du professeur de mathématiques Gaston Floquet*, alors doyen de la faculté.

Ce dernier est en effet engagé dans un ambitieux projet de création d’une filière d’aérodynamique et de météorologie à Nancy qui aura une existence éphémère juste avant 1914. Il écrit ainsi au recteur : « J’ai le regret d’avoir à vous transmettre, en l’appuyant, la demande ci-jointe de M. Millot, qui sollicite sa mise à la retraite. Mes collègues de la Physique et moi, nous avons tout tenté pour le faire revenir sur sa détermination. Mais elle est inébranlable, la santé de notre cher collègue s’accommodant mal désormais des durs hivers de Nancy. » Gaston Floquet* demande au ministère de l’Instruction publique qu’en récompense pour ses services Millot soit nommé professeur honoraire. Il sera finalement nommé chargé de cours honoraire. On notera qu’il avait été nommé officier d’Académie en 1881 puis officier de l’instruction publique en 1889.

Millot s’investit pleinement au sein des institutions scientifiques, universitaires, académiques et intellectuelles de la ville. Ainsi il n’enseigne pas qu’à la faculté des sciences, mais il intervient aussi ponctuellement dans d’autres formations, par exemple pour un cours de physique météorologique à l’École forestière en 1888 et 1889. Outre ses responsabilités au sein de la Commission météorologique départementale, il est également un des membres fondateurs de la Société de géographie de l’Est en 1879 et il rédige régulièrement, dans son bulletin, des chroniques, des recensions d’ouvrages et des récits de voyage. C’est lui-même un savant productif. Outre son cours, il publie en effet de très nombreux articles sur ses observations météorologiques menées à Nancy ; quelques-uns paraissent dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences ou dans l’Annuaire de la Société météorologique de France, mais la majorité est destinée au Bulletin de la Société des sciences de Nancy et aux Mémoires de l’Académie de Stanislas, deux sociétés savantes dans lesquelles il est très impliqué.

Il est élu à l’Académie de Stanislas en 1888 et il en assure successivement la questure (1890-1892), la vice-présidence (1894) et la présidence (1895). Il en va de même pour la Société des sciences de Nancy dont il devient membre dès 1883. À partir de 1891 il en devient un des piliers ; il en est successivement vice-président (1891), président (1892) puis à de très nombreuses reprises secrétaire général puis secrétaire général honoraire, et ce jusqu’en 1925. Ces divers engagements témoignent d’un solide réseau de sociabilité scientifique au sein du paysage universitaire nancéien ; il sera ainsi un grand ami du géologue et océanographe Julien Thoulet*. Les sources indiquent qu’il est encore actif dans ces institutions en 1932, soit un an avant sa mort.

Laurent Rollet

Bibliographie

Millot Charles (1882), « Rapport sur les travaux de la commission météorologique de 1878 à 1882 », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1884), « Études sur les orages dans le département de Meurthe-et-Moselle », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1884), Cours de météorologie professé à la Faculté des sciences de Nancy et inauguré en janvier 1884, par M. C. Millot, première, deuxième et troisième parties, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1885), « La classification des nuages de Poêy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1886), « Le climat de Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1890), « Marche apparente et trajectoire vraie des orages sur l’horizon », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1891), « La nébulosité à Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1891), « Températures normales et quantités normales de pluie à Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1892), « Marche annuelle normale de la température de l’air à Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1892), « Répartition de la pluie et des orages dans une année normale à Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1893), « L’humidité de l’air à Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1895), « L’évaporation sous le climat de Nancy », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1895), Les cyclones, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1896), « De l’insolation à Nancy, ses rapports avec la nébulosité », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

___ (1897), De l’action de la nébulosité sur l’amplitude de l’oscillation diurne de la température, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1899), Températures extrêmes de 1878 à 1897 à Nancy, Nancy, Imprimerie Berger-Levrault.

___ (1901), Notions de météorologie utiles à la géographie physique, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1902), Les rafales de montagnes, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1905), Brouillards de mars et gelées de mai. La lune rousse, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1908), La pluie à Nancy de 1878 à 1907, Nancy, Imprimerie Berger Levrault.

___ (1912), « Comment la lune pourrait influencer le temps », Mémoires de l’Académie de Stanislas.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/22079).

Sources secondaires

Bonnefont Jean-Claude (2002), « Julien Thoulet, fondateur à Nancy de l’océanographie française (1843-1936) », Mémoire de l’Académie de Stanislas.

Rollet Laurent & Nabonnand Philippe (2014), « Why Aerodynamics Failed to Take off in Nancy : An Unexpected Casualty of World War I », in Aubin David, Goldstein Catherine & Ritter Jim, A War of Guns and Mathematics, États-Unis, American Mathematical Society, 351-369.