Philippe Antoine LASSEUR

1882, 1946
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Philippe Antoine
Lasseur
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Chimie agricole
;
Texte
; par :
Étienne Bolmont

Philippe Antoine LASSEUR (1882-1946)

Chargé de conférences de chimie agricole

Philippe Antoine Lasseur est né le 27 juin 1882 à Courçais dans l’Allier. Son père Jean y est propriétaire terrien. Il se marie au début des années 1930 avec son assistante de microbiologie à la Faculté de pharmacie de Nancy, Andrée Dupaix, et ils auront deux enfants, en 1934 et 1937. Lasseur décède des complications consécutives à une pneumonie en janvier 1946.

Il accomplit ses études à l’École pratique départementale d’agriculture puis il est envoyé à l’École nationale d’agriculture de Grignon dont il sort major en 1904. Il commence une carrière professionnelle à la Station agronomique de l’Est, créée en 1867 par Louis Nicolas Grandeau*, établissement destiné aux analyses chimiques en agriculture et à des expériences de physiologie végétale. Il y occupe la fonction de commis de novembre 1905 à septembre 1906, puis celle de préparateur bactériologiste d’octobre 1906 à juin 1908. Il y est ensuite nommé préparateur chimiste de juillet 1908 à 1914. Dans ses démarches en 1938 pour préparer sa retraite, il ne pourra pas valider ces années, n’ayant pas cotisé à la Caisse départementale des retraites. Pendant ce temps, il obtient sa licence en 1910 et un doctorat ès sciences naturelles en 1911 à la Faculté des sciences de Nancy sous la direction de Lucien Cuénot* : Contribution à l’étude de Bacillus chlororaphis G. et S. Il bénéficie alors d’une aide de la Caisse nationale de la recherche scientifique qui lui permet de poursuivre ses travaux.

Il est nommé chargé de conférences de chimie agricole en 1913 à la Faculté des sciences de Nancy. L’année suivante, il devient chargé de cours de chimie agricole à l’Institut agricole et colonial, fonction qu’il assure jusqu’en 1918. Parallèlement, engagé volontaire dès le début de la guerre, il est affecté à Nancy au Laboratoire régional de bactériologie de la 20e région (ce qui lui vaudra un rappel d’ancienneté pour services militaires d’un an et demi et une majoration pour services de guerre de onze mois en 1929).

En 1916, il est chargé de cours de bactériologie à l’École supérieure de pharmacie, où il enseigne aux étudiants en pharmacie mobilisés. En 1919, il est statutairement préparateur d’histoire naturelle à la Faculté de médecine de Nancy et chargé d’un cours complémentaire de bactériologie à l’École de pharmacie (jusqu’en 1921). Il obtient son diplôme de pharmacien en 1922.

En janvier 1923, Lasseur est nommé à la chaire de microbiologie nouvellement créée à la faculté de pharmacie. Il a bénéficié de son expérience d’enseignement de bactériologie à la fin de la guerre pour obtenir ce poste et, à un moment où il n’existe pas encore de formation diplômante dans ce domaine, on le considère parfois comme autodidacte. Promu à la troisième classe en janvier 1924, il passe à la deuxième en août 1929 et à la première en avril 1933. Son activité à la faculté de pharmacie est importante : il crée une « école de microbiologie » très active, qui édite ses propres annales à partir de 1928, les Travaux du laboratoire de microbiologie de la faculté de pharmacie de Nancy. Il y publie l’essentiel de ses recherches. Cette revue perdurera après sa mort jusqu’en 1970. Il crée un certificat de microbiologie en 1927 et fonde l’Association des diplômés de microbiologie de Nancy en 1931.

Il est l’auteur d’environ 300 articles, une production « jugée surabondante à des travailleurs normaux » par le doyen Pierre Seyot. Par ailleurs, au milieu des années 1930, le recteur Louis Bruntz, ancien doyen de la faculté de pharmacie, réprouve son attitude, sa folie des grandeurs, son sentiment de persécution et de non-reconnaissance de ses mérites. Il lui reproche également son peu de sens administratif et il l’accuse de conspirer contre Seyot, dont il est l’assesseur : il agit selon lui comme un « doyen occulte » ! Mais tous deux reconnaissent qu’il fait honneur à l’université, sachant s’entourer de chercheurs auxquels il communique sa foi, les incitant à fournir une production scientifique et les préparant ainsi au doctorat.

Ses recherches portent au départ sur la nature des pigments microbiens. Il étudie ensuite les organes moteurs des bactéries et les réactions anticorps pour lesquelles il reçoit de l’Académie des sciences le prix Montyon en 1922. Ses travaux portent aussi sur la mutation et la dissociation bactérienne, l’agglutination et la précipitation par les cations, les milieux de culture, la nutrition et perméabilité bactérienne, la fixation des colorants… Son enseignement est très apprécié par « sa clarté, sa documentation et sa facile compréhension ».

Lasseur s’implique localement dans la Société des sciences de Nancy, dont il est secrétaire en 1922. Il y présente notamment ses recherches sur l’action de traces de fer sur la coloration des colonies de Bacillus.

Après la guerre, il y expose également le phénomène d’adsorption dans les réactions anticorps. Il participe en 1924 aux travaux de la Commission régionale de lutte contre le cancer. Il devient correspondant de la Société de biologie de 1936 à 1940. Il reçoit de nombreuses récompenses de l’Académie des sciences : en 1922 le prix Montyon déjà cité, en 1933 le prix de la Fondation Roy-Vaucouloux et, en 1938, à nouveau le prix Montyon en médecine et chirurgie. De l’Académie de médecine, il reçoit le prix Buignet et la bourse Blum. Chevalier du Mérite agricole, il avait reçu la Légion d’honneur en 1934.

En septembre 1939, il se retrouve isolé à Courçais. Désirant retrouver son travail, il demande et obtient un sauf-conduit qui lui permet de rentrer à Nancy, qui est alors en zone occupée. En août 1941, il écrit au sous-secrétaire d’État à l’Éducation nationale pour se plaindre de sa situation : bloqué en zone occupée, il ne peut aller voir ses vieux parents dans l’Allier et il doit assurer le travail des enseignants restés en zone libre, qui sont sans véritable emploi et reçoivent pourtant un salaire… Lasseur meurt en activité.

Étienne Bolmont
L’auteur adresse ses remerciements à Pierre Labrude.

Bibliographie

Lasseur Antoine Philippe (1911), Contribution à l’étude de bacillus chlororaphis, thèse de doctorat, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1925), Contribution à l’étude des pigments microbiens, Nancy, Imprimerie de J. Coubé et fils.

___ (1931), Laboratoire de microbiologie de la faculté de pharmacie de Nancy, cours d’ouverture : novembre 1930, novembre 1931, Thomas.

Lasseur Antoine Philippe & Spillmann L. (1921), Réactions anticorps : étude quantitative de la fixation de l’alexine, Nancy.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/26311).

Sources secondaires

Labrude Pierre (1988), « Les enseignants qui ont donné leur nom aux salles et amphithéâtres de la faculté de pharmacie de Nancy », Revue d’histoire de la pharmacie, 76, 361-368.