Marcel DUFOUR

1868, 1946
;
Marcel
Dufour
;
Physique
;
Texte
; par :
Étienne Bolmont

Marcel DUFOUR (1868-1946)

Chef de travaux de physique

Marcel Jean Baptiste Dufour est né le 24 novembre 1868 à Nancy. Il se marie en août 1928 avec Rose Marguerite Gruber alors âgée de 45 ans. Il décède en 1946.

Après ses études secondaires au lycée de Nancy, et l’obtention des baccalauréats ès lettres (1885) puis ès sciences (1886), il prépare au lycée Saint-Louis de Paris les concours d’entrée à l’École normale supérieure et à l’École polytechnique. Il est reçu aux deux écoles et choisit l’École normale supérieure. Il y passe les licences de sciences mathématiques et de sciences physiques.

Il quitte l’École normale supérieure en 1891, et rejoint la Faculté des sciences de Nancy en tant que préparateur adjoint de physique en août 1892. Il est reçu 10e à l’agrégation de sciences physiques en 1893. En novembre 1894, succédant à Léon Pérolla*, il devient chef de travaux de physique, poste qu’il occupe jusqu’en octobre 1899. À cette date, « entraîné par une vocation irrésistible vers la médecine », il demande un congé d’inactivité pour entreprendre des études de médecine. Après plusieurs années d’études, il obtient son doctorat en 1904, avec une thèse sur l’astigmatisme. Il travaille en tant qu’aide de clinique à la clinique des Quinze-Vingt de Nancy, d’août 1904 à octobre 1905. Il parfait ensuite ses connaissances au service d’ophtalmologie de l’hôpital Lariboisière à Paris. En mai 1907, il réussit l’agrégation de médecine avec la spécialité de physique biologique et médicale. Quelques mois plus tard, en novembre 1907, il est nommé professeur agrégé de physique médicale à la Faculté de médecine de Nancy pour une période de neuf ans. En 1912, il est chargé d’une mission du ministère de l’Instruction publique pour étudier l’enseignement de la physique aux étudiants en médecine en Allemagne et en Autriche.

Candidat dès 1912 à un poste à Alger, il l’obtient en février 1914, et devient professeur de physique médicale à la Faculté mixte de médecine et de pharmacie de l’Université d’Alger, avec l’appui d’Edmond Bouty et du ministre des Colonies Albert Lebrun. Pendant la guerre, il dirige deux services d’ophtalmologie. En mars 1919, il obtient l’autorisation de se mettre à disposition de la Faculté de médecine de Nancy pendant le second semestre. En 1921, il obtient à nouveau l’autorisation de se rendre en France pour trois mois, il en profite pour donner des conférences d’optique médicale à l’hôpital Lariboisière. À Alger, il donne aussi un cours complémentaire de physique pharmaceutique de 1921 à 1924. En même temps, il commence à préparer son retour en métropole, pour raisons de santé, mais aussi parce que la recherche n’est pour lui guère possible à Alger. Il fait de nombreuses demandes argumentées de création d’une chaire d’optique médicale, à Nancy et à Paris, mais les facultés concernées reculent devant la perspective des dépenses que cela entraînerait. À Nancy où il s’agit de remplacer le professeur Joseph Rohmer dans la chaire de clinique ophtalmologique, sa demande est l’objet d’un rapport favorable du professeur Albert Fruhinsholz, mais la Faculté de médecine de Strasbourg rédige un rapport contre la création de ce poste en province. Dufour se manifeste ensuite pour obtenir une chaire à la nouvelle faculté de médecine de Marseille, puis à celle de Montpellier où, malgré de nombreux soutiens comme celui de Charles Reibel, ministre des Régions libérées, on lui préfère un candidat local. Il postule aussi en vain à Paris, où il s’est fait apprécier par ses conférences d’optique médicale.

Finalement, en février 1924, il revient à Nancy à la chaire de physique médicale où il remplace le professeur Mayer Lambert qui prend la chaire de physiologie. Il donne aussi un cours à l’Institut dentaire en 1930-1931. Il est promu à la 1re classe en janvier 1932, et finalement mis à la retraite le 1er août 1934, pour cause de suppression d’emploi. Si on excepte les dix années qu’il a passées en Algérie, Marcel Dufour a accompli toute sa carrière à Nancy. Dans la première partie en tant que préparateur de physique à la faculté des sciences, il est initié à la recherche par René Blondlot*, qui contribue à sa préparation à l’agrégation de physique. Il participe aussi aux recherches sur les ondes électromagnétiques qui vont assurer à Blondlot* sa réputation ; dans ses lettres à Henri Poincaré, Blondlot* souligne la participation active de Dufour, qui lui suggère des dispositifs expérimentaux. Celui-ci publie d’ailleurs son premier article avec Blondlot*. Pendant cette période, il donne des conférences préparatoires aux travaux pratiques de physique, et il est chargé d’interrogations au lycée de Nancy de 1896 à 1899.

Pendant les années où il est professeur agrégé à la Faculté de médecine de Nancy, de 1907 à 1914, il donne des conférences complémentaires de physique biologique et médicale aux étudiants de médecine de 1re et 2e année, mais sa charge d’enseignement reste faible, « il se morfond à la faculté » selon le recteur Charles Adam en 1910. Cela lui laisse le temps de s’investir dans des publications et il traduit plusieurs ouvrages de philosophie des sciences, de Wilhelm Ostwald (L’évolution d’une science : la chimie, Les grands hommes) et d’Ernst Mach (La connaissance et l’erreur) qui lui valent une réputation de philosophe et d’homme de grande culture : « c’est une des forces de notre université » écrit le recteur Adam en 1913. Après son retour d’Algérie, sa santé n’est pas très bonne ; il obtient alors de nombreux congés en 1926-1927 pour troubles psychasthéniques, puis en 1931 pour surmenage intellectuel. Son enseignement n’est pas très suivi par les étudiants qui ne fréquentent pas non plus son laboratoire. Le recteur note alors : « Il est bien certain que les étudiants ne prisent pas beaucoup les sciences physiques ».

Dufour a conduit des recherches essentiellement en optique, s’intéressant particulièrement à ses applications sur la correction de la vue. Quand il se présente à Nancy en 1924, il totalise plus de 70 articles en optique géométrique : il étudie les verres correcteurs, la dioptrique oculaire des vertébrés, la dioptrique du Suédois Allvar Gullstrand qu’il contribue à faire connaître en France, l’ophtalmoscopie et l’endoscopie, ainsi que les objectifs photographiques. Il approfondit l’optique physiologique, il étudie l’accommodation, la vision binoculaire, certains appareils d’ophtalmologie comme le diphoscope, les lunettes hétérochromes, puis aborde la vision des couleurs, les mouvements de l’œil, la persistance rétinienne, les phénomènes visuels, les localisations cérébrales et les rapports entre optique et beaux-arts. Une grande partie de ces publications relève de conférences, d’articles de vulgarisation, de présentations d’instruments ; selon le rapport concernant sa candidature de 1924 à Nancy elles manquent « d’originalité, on y cherche vainement la note personnelle de leur auteur », mais elles lui donnent la notoriété d’un « des maîtres les plus cultivés de la Faculté » selon le recteur Adam. La somme de ses travaux montre aussi qu’il est un « travailleur inlassable ». Son talent de vulgarisateur, son expression claire, le souci de se faire comprendre de tous lui confèrent aussi des qualités d’enseignant reconnues.

Étienne Bolmont

Bibliographie

Blondlot René & Dufour Marcel (1892), « Sur l’influence exercée sur les phénomènes de résonance électromagnétique, par la dissymétrie du circuit le long duquel se propagent les ondes », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 114, 347-349.

Dufour Marcel (1894), « Égalité des vitesses de propagation d’ondes électriques très courtes dans l’espace libre et le long de fils conducteurs », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 118, 1039-1042.

___ (1899), « Remarque sur les réseaux de conducteurs, une propriété du pont de Wheatstone », Journal de physique théorique et appliquée, 8, 1, 165.

___ (1904), Les verres cylindriques et toriques et la correction de l’astigmatisme, thèse de médecine, Maloine.

___ (1907), Quelques renseignements sur les verres de lunettes et leur emploi, A. Maloine.

___ (1908), La vision des couleurs et les phénomènes de contraste, Crépin-Leblond.

___ (1911), La photographie des couleurs, Thomas.

___ (1912), Le daltonisme, Pierron.

___ (1912), « Ophtalmoscope sans reflets ni voile du professeur Gullstrand », Journal de physique théorique et appliquée, 2, 1, 465-471.

___ (1912), « Questions nouvelles d’optique psychophysiologique », L’année psychologique, 19, 1, 257-267.

___ (1913), Titres et travaux scientifiques du docteur Marcel Dufour, Berger-Levault.

___ (1913), « Questions nouvelles d’optique psychophysiologique », L’année psychologique, 20, 1, 202-217.

___ (1919), « La question de l’éclairage en ophtalmologie », Annales d’oculistique, 156, 11.

___ (1922), « Relation entre l’aberration et l’astigmatisme pour un point situé sur l’axe d’un système optique centré », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 174, 288-289.

___ (1922), « Sur la réfraction d’un pinceau lumineux dans le cas général », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 174, 1539-1541.

___ (1924), « L’enseignement de la physique dans les facultés de Médecine », Revue Médicale de l’Est, 243-262.

___ (1927), « Propriétés d’un pinceau de normales », L’enseignement mathématique, 26, 294.

___ (1928), « Réfraction du pinceau astigmate : la troisième équation de Sturm », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 186, 631-632.

___ (1928), « Réfraction d’un pinceau lumineux parallèle normal à une lentille cylindrique », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 186, 75-77.

___ (1929), « Sur les ovales de Descartes », L’enseignement mathématique, 28, 177.

___ (1930), « L’Astigmatisme du pinceau réfracté par un dioptre sphérique », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 190, 1008.

___ (1930), « La représentation du pinceau astigmate et la droite auxiliaire de Mannheim », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 191, 1311.

___ (1930), « Sur les trajectoires orthogonales des génératrices d’une surface réglée », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 191, 39.

___ (1931), Allvar Gullstrand. 5 juin 1862-28 juillet 1930, G. Doin.

___ (1932), « La suppression de l’astigmatisme des faisceaux obliques dans les lentilles minces », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 194, 604.

___ (1932), « L’astigmatisme d’un pinceau oblique réfracté par le dioptre sphérique », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 194, 365.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/24364).

Sources secondaires

Collectif (1910), « Dufour Marcel », in Collectif (Ed.), Dictionnaire biographique illustré de la Meurthe-et-Moselle, Paris, Dictionnaires biographiques illustrés départementaux de la Librairie Flammarion, R. Wagner éditeur, 1910, p. 183.

Walter Scott, Bolmont Étienne & Coret André Ed. (2007), La correspondance d’Henri Poincaré, volume 2 : correspondance entre Henri Poincaré et des physiciens, chimistes et ingénieurs, Berlin, Birkhäuser.

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