Jules DANIS
Jules DANIS (1867-1934)
Chef de travaux de chimie appliquée et de sidérurgie
Jules Victor Danis est né le 26 février 1867 à Forbach, en Moselle. Son père Armand Joseph Danis (1824-1907) est receveur des douanes et sa mère Catherine Marie Apolline (1832-1902), née Karst, est issue d’une famille de pâtissiers-confiseurs. En mai 1872, suite au traité de Francfort, la famille opte pour la nationalité française et s’établit à Mailly-sur-Seille, dans la Meurthe. Jules Danis épouse à Lunéville, le 1er octobre 1894, Lucie Joséphine Mathieu (1869-1929), dont il aura cinq enfants. Une de ses filles, Anne-Marie, fera partie des premières femmes admises à l’École supérieure de commerce de Nancy en 1915. On notera que Jules Danis est un parent par alliance de Louis Authelin*. Danis meurt le 25 avril 1934, à Nancy.
Danis fait ses études à Pont-à-Mousson. Après le baccalauréat ès sciences, il amorce sa carrière professionnelle à Sedan comme maître d’études au collège Turenne et à l’école primaire supérieure de la ville. À partir d’octobre 1885, il est nommé préparateur de physique et de chimie et l’année suivante il part vers la Faculté des sciences de Lyon en tant que préparateur adjoint de chimie générale. Il seconde à ce poste le professeur de chimie Émile Alphonse Camille Louïse. Parallèlement, il suit pendant deux ans les cours de la faculté en tant qu’élève libre. En janvier 1889, il est nommé préparateur adjoint à la Faculté des sciences de Caen. En novembre, il obtient sa licence ès sciences physiques et il est alors chaudement recommandé par le recteur et par Louïse pour le poste de préparateur titulaire vacant dans cette même faculté. Il est nommé en février 1890. À Caen, il doit non seulement préparer les cours de la faculté et diriger les manipulations pour la licence, mais il participe aussi largement à la préparation des cours de l’école de médecine et de pharmacie. Il assure cette lourde tâche pendant quelques années. Durant cette période, ses évaluations de services sont relativement contrastées. Le recteur écrit ainsi que s’il est un bon professeur, « il n’a qu’une aptitude médiocre pour la chimie et n’est bon fonctionnaire que par respect du devoir ».
En février 1894, Danis est contraint de prendre un congé de six mois pour soigner des troubles neurasthéniques. C’est à cette période qu’il se rapproche de Nancy. Durant ce congé de maladie, il prépare en effet une licence de mathématiques et il noue, semble-t-il, des contacts avec les enseignants de la Faculté des sciences et de l’Institut chimique. En juillet 1894, il demande à être nommé sur un poste de chef de travaux dans une faculté ; le contexte est alors favorable en raison d’une campagne de création de postes liée à la montée en puissance des instituts techniques. Finalement, il se voit contraint de prolonger son congé maladie jusqu’en mars 1897. Durant ces trois années, il réside à Nancy et il touche une indemnité de 100 francs par an. Il se marie en octobre 1894 et il obtient sa licence de mathématiques en 1896.
Le 25 mars 1897, il est nommé préparateur du cours de chimie tinctoriale à l’Institut chimique de la Faculté des sciences de Nancy. L’année suivante, en juin 1898, il est nommé chef de travaux chimiques en remplacement de Jules Minguin* qui vient d’être nommé maître de conférences, et avec qui il semble entretenir des relations très amicales. En 1902, Danis est nommé directeur de l’École professionnelle de l’Est (actuel lycée Loritz), en remplacement de Robert Herborn. Fondé en 1844, cet établissement d’enseignement technique réputé fournit alors de nombreux élèves aux instituts techniques et il n’est pas sans intérêt pour la faculté de voir un de ses chefs de travaux en prendre la direction. De son côté, Danis semble particulièrement désireux de conserver des attaches au sein de la faculté. Sous la direction d’Herborn, l’école a été agrandie pour accueillir un musée industriel ainsi qu’une école supérieure de commerce. La nomination de Danis à l’École professionnelle de l’Est se fait dans un climat houleux, Herborn ayant démissionné suite à un conflit avec le conseil d’administration. Cette instabilité explique sans doute le flottement temporaire dans le statut de Danis au sein de la faculté. En avril 1902, il démissionne de son poste de chef de travaux. Il est alors question de le remplacer par Camille Richard*. Cependant le recteur demande à Danis de terminer l’année scolaire pour garantir la continuité du service, ce qu’il accepte. Cette situation est reconduite l’année suivante. Finalement, Danis conserve son poste de chef de travaux tout en assurant ses fonctions de directeur de l’École professionnelle de l’Est et de l’École supérieure de commerce de Nancy.
Cette dernière connaît alors de graves difficultés, malgré l’aide de la Chambre de commerce : elle manque en effet de financements et ses effectifs sont trop faibles, suite à la suppression des dispenses de service militaire pour les étudiants en commerce, votée en 1902. En 1905, la Chambre de commerce décide alors de transférer les cours dans une nouvelle école placée sous tutelle universitaire : il s’agit là des prémices de l’Institut commercial de Nancy. Cette création ne remet pas fondamentalement en question le statut de l’école supérieure de commerce : comme celle-ci bénéficie des infrastructures industrielles de l’École professionnelle de l’Est, une alliance avec l’institut commercial est mise en place en 1910. L’année suivante, il est décidé que les étudiants de l’école supérieure de commerce – renommée école supérieure de commerce et d’industrie – pourront être admis directement en seconde année à l’Institut commercial de Nancy. Cette situation perdure jusqu’à la fin des années 1930. Jules Danis, quant à lui, dirige l’École professionnelle de l’Est jusqu’en 1919, moment où il cède la direction de l’école à Adrien Millot, sous-directeur de l’établissement depuis 1902. Il continue cependant à diriger l’école supérieure de commerce et d’industrie. En 1923, il prend par ailleurs la direction de l’Institut commercial de Nancy.
C’est donc parallèlement à ses responsabilités de directeur de l’école professionnelle que Danis poursuit sa carrière de chef de travaux à la faculté des sciences. De 1902 à 1908, ses responsabilités sont cantonnées à l’institut chimique. En mars 1908, son poste est supprimé, mais il est alors nommé à l’institut électrotechnique sur un poste nouveau (chimie et industrie), avec un traitement annuel de 1 000 francs financé par le département. En janvier 1910, il est nommé chef auxiliaire des travaux pratiques, toujours avec le même traitement, mais financé cette fois sur les fonds de l’université. En 1913, son poste évolue enfin vers celui de chef de travaux de chimie appliquée et de sidérurgie ; il est maintenu dans ces fonctions durant toute la guerre, après quoi il poursuit sa carrière universitaire jusqu’en 1927, dispensant des enseignements aux élèves des instituts chimique, électrotechnique et métallurgique et minier (l’actuelle École nationale des mines de Nancy, créée en 1919). Bien qu’il ne se soit pas investi dans la recherche scientifique, Danis semble avoir été passionné toute sa vie par le travail de laboratoire. On trouve ainsi dans les journaux spécialisés (notamment le Bulletin de la Société chimique Paris) quelques références à des travaux qu’il a pu mener en chimie (par exemple en 1900 des travaux consacrés à l’action de l’anhydride succinique sur la naphtaline en présence de chlorure d’aluminium). En raison de ses multiples responsabilités administratives et de ses nombreux contacts dans les milieux industriels, Danis est bien inséré parmi les élites locales : il est ainsi directeur général des Soudières de la Madeleine près de Nancy de 1905 à 1915 et, vers 1930, des Établissements Marchéville-Daguin de Varangéville. Membre du conseil départemental de l’Instruction publique, il sera par ailleurs inspecteur régional de l’enseignement technique.
Il est également une cheville ouvrière de la Société industrielle de l’Est, au sein de laquelle il fait partie du conseil des sciences ainsi que du conseil de législation commerciale et industrielle. Membre de l’Association française pour le développement de l’enseignement technique à partir de 1909, il s’investit fortement en faveur du développement de l’apprentissage et de l’enseignement professionnel. C’est d’ailleurs dans ce registre spécifique qu’il s’engage en tant qu’organisateur et membre du jury dans l’Exposition internationale de l’Est de la France en 1909.
Durant la Première Guerre mondiale, il tente tant bien que mal de maintenir le fonctionnement de l’École professionnelle de l’Est et de l’école supérieure de commerce et d’industrie. Ses locaux accueillent d’abord une ambulance modèle de la Croix-Rouge qui devient par la suite l’hôpital auxiliaire n°3. Celui-ci reçoit près de 300 blessés après la bataille de Morhange en Moselle. Afin d’éviter les réquisitions, Danis met par ailleurs les ateliers industriels de l’école à la disposition des autorités militaires pour produire des obus (entre 150 et 200 par jour).
Membre du conseil d’administration de l’Institut métallurgique et minier, il fera partie du conseil de perfectionnement de l’Institut électrotechnique au début des années 1930 et il obtiendra en outre les palmes académiques.
Laurent Rollet
Bibliographie
Danis Jules (1910), « L’enseignement professionnel », Bulletin de la Société industrielle de l’Est, 68-72.
Sources d’archives
Archives nationales : dossier de carrière (F/17/23907).
Sources secondaires
Anonyme (1910), « Jules Danis », in Collectif, Dictionnaire biographique illustré de la Meurthe-et-Moselle, Paris, Dictionnaires biographiques illustrés départementaux de la Librairie Flammarion, R. Wagner éditeur.
Anonyme (1934), « Monsieur Jules Danis », Bulletin de l’Association des anciens élèves de l’Institut chimique de Nancy et de l’École nationale supérieure des industries chimiques, 3, 6-7.
Birck Françoise (2014), L’école des mines de Nancy (ENSMN) 1919-2012 : entre université, grand corps d’État et industrie, Nancy, PUN – Éditions universitaires de Lorraine.
Galmiche Jean-Marc, Montacie Jean & Moulin François (2006), Loritz, histoire d’un lycée pionnier, Nancy, Éditions OML.
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