Émile CHANTRIOT

1865, 1937
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Émile
Chantriot
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Géographie
;
Texte
; par :
Christian Molaro

Émile CHANTRIOT (1865-1937)

Chargé de conférences sur les civilisations asiatiques et africaines

Émile Auguste Chantriot est né à Troyes le 24 juillet 1865. Son père exerce la profession de négociant. En 1889 il épouse Henriette Coblentz (1857- ?) à Nancy ; ils auront 3 enfants. Il décède à Nancy le 18 novembre 1937.

Chantriot fait ses études secondaires au lycée de Troyes, de 1872 à 1883, puis au lycée Louis Le Grand où il reste un an. Bachelier ès lettres, il rejoint ensuite la Faculté des lettres de Nancy et y obtient une bourse de licence en novembre 1885. Son statut de boursier l’oblige à contracter un engagement décennal qui le dispense du service national et lui permet d’être affecté comme maître auxiliaire au lycée de Nancy dès 1885. Lauréat de la Faculté en 1886, il obtient sa licence ès lettres en juillet 1887. Ayant obtenu une bourse d’agrégation, il prépare ce concours en 1887-1888. Il est admissible pour la première fois à l’agrégation d’histoire et géographie en 1889 ; il l’obtiendra en 1892.

En septembre 1889, Chantriot est chargé de cours d’histoire au lycée de Bourges. Trois mois plus tard, il obtient un poste au lycée de Bar-le-Duc, ce qui lui permet de se rapprocher de Nancy. Il reste dans ce lycée jusqu’en novembre 1894, moment où il est nommé professeur suppléant au lycée de Nancy. L’année suivante, il est titularisé. Il occupe ce poste jusqu’à sa retraite en 1925. Cependant, en février 1918, à la suite des bombardements de Nancy, il est affecté à sa demande au lycée de Moulins (Allier), où il reste un an.

Parallèlement à ses activités dans l’enseignement secondaire, il donne dès 1896 des cours de géographie à l’École supérieure de commerce de Nancy. Il dispense par ailleurs en 1898 un cours d’histoire dans le cadre de l’enseignement des jeunes filles à l’université (9 leçons).

En novembre 1906, il est chargé de ses premiers cours à l’Institut agricole et colonial de la Faculté des sciences de Nancy ; il s’agit de conférences coloniales publiques. Il ambitionne alors une intégration universitaire, mais, quelques mois plus tard, le recteur Charles Adam souligne, dans son évaluation annuelle de Chantriot, qu’il semble avoir renoncé à l’enseignement supérieur. Ses conférences à l’Institut colonial de Nancy portent sur les civilisations d’Afrique et d’Extrême-Orient. Chantriot les poursuit bien après sa retraite, qu’il prend en 1925. Il ne les arrête en effet, pour raisons de santé, qu’en 1937. À l’Institut agricole et colonial, il intervient également ponctuellement comme membre de jury. Signe de son investissement, il coorganise en mai 1930 une célébration autour du centenaire de la conquête de l’Algérie.

Ses premiers travaux de recherche concernent la géographie. Durant ses études à la Faculté des lettres de Nancy, il côtoie Bertrand Auerbach* qui contribue probablement à son orientation marquée vers la géographie régionale. Dans la droite ligne de ce dernier et de Paul Vidal de la Blache, il consacre ainsi sa thèse à une étude géographique de la Champagne. Il la soutient en 1905 à la Sorbonne et elle est publiée l’année suivante sous le titre : La Champagne, étude de géographie régionale. Après sa thèse il recentre ses recherches sur le conflit franco-prussien de 1870-1871 et devient progressivement une référence sur les questions liées à l’occupation allemande de la Lorraine. Il publie ses travaux dans les Annales de l’Est, dans la Revue de Paris et dans la Nouvelle revue. En 1913-1914, il signe par ailleurs plusieurs articles dans le quotidien régional L’Est républicain sur ce sujet. Il collabore aussi au lancement, en 1921, de La pensée française. Cette publication, domiciliée à Strasbourg, se présente comme un « organe d’expansion française et de propagation nationale » attachée à « … ces pays d’Alsace et de Lorraine rachetés au prix du sang des meilleurs des Français ». Il y consacrera plusieurs articles dédiés à la politique en 1921-1923.

En 1910-1911, Chantriot publie un manuel d’histoire de France et d’histoire générale destiné à la formation des officiers et des sous-officiers, un précis de géographie et un mémento de géographie économique. Versé dans l’éducation populaire, il donne de nombreuses conférences publiques et il participe aux activités locales de la Ligue de l’enseignement.

En octobre 1932, sur proposition du recteur Louis Bruntz*, Chantriot est fait chevalier de la Légion d’honneur. C’est sans doute ses qualités d’historien, son engagement républicain et son profond attachement à sa terre d’adoption qui lui valent cette distinction. En effet, les rapports des inspecteurs d’académie et du recteur soulignent de manière récurrente que son enseignement laisse à désirer par son manque de préparation et son caractère « vieillot ». Peut-être a-t-il été aidé par un coup de pouce du destin ? Telle est semble-t-il la thèse de cet article paru dans l’Œil de Paris de 1932 : « Dédommagement : M. de Monzie n’a pas attendu d’être ministre pour sillonner le pays de ses voyages multiples. Peu avant la constitution du ministère, il était attendu à Nancy pour une conférence sur la Russie. Quelques heures avant la réunion, l’organisateur apprit par un télégramme que M. de Monzie était retenu à Marseille par une plaidoirie. Bravement, M. Émile Chantriot improvisa une causerie sur les contacts franco-allemands d’après-guerre. L’exactitude est la politesse des ministres, sinon ils doivent réparer ; aussi dans la dernière promotion, M. Émile Chantriot vient-il de recevoir la Légion d’honneur. Il est juste de dire qu’on attendait depuis longtemps cette distinction qui couronne la carrière d’un historien probe, observateur patient, tel M. Vermeil à Strasbourg de l’énigme germanique. »

Christian Molaro

 

Bibliographie

Chantriot Émile (1893), Les origines de l’entente franco-russe. Nancy, Berger-Levrault.

___ (1895), « Le pays d’Othe », Annales de géographie, 18, 453-463.

___ (1897), « La falaise de Champagne et le vignoble champenois », Annales de géographie, 23, 230-238.

___ (1901), « La Thiérache », Annales de géographie, 51, 216-225.

___ (1905), Les cartes anciennes de champagne : catalogue et observations critiques, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1905), « L’Église et le libéralisme d’après Ernest Renan », L’éducation sociale, 2, 46-53.

___ (1906), La Champagne. Étude de géographie régionale. Thèse de doctorat de géographie soutenue à la Sorbonne, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1906), « L’expansion jaune », Bulletin de l’Institut colonial de Nancy, VI, 199-207.

___ (1908), Les provinces perdues d’après Ardouin-Dumazet, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1910), L’Allemagne et sa situation économique, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1910), Précis d’histoire de France et d’histoire générale, à l’usage des candidats aux écoles de sous-officiers, élèves officiers et des élèves officiers de réserve, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1910), Les grands ports extra-européens et le commerce international, Paris & Nancy.

___ (1911), Mémento de géographie à l’usage des élèves de 1re. Classes de 1re des lycées et collèges, Paris & Nancy, Berger-Levrault.

___ (1911), Précis de géographie, Paris, Berger-Levrault.

___ (1913), « L’occupation allemande de la Meurthe (1870-1871) », La revue de Paris, tome 3 (mai-juin), 91-112.

___ (1916), « L’administration des départements envahis en 1870-1871 », La nouvelle revue, XXIV, 40-48.

___ (1919), « Les Allemands à Verdun », La nouvelle revue, LXII, 319-339.

___ (1919), Les Allemands en Lorraine. 1871-1873, Paris, Berger-Levrault.

___ (1921), « Gambetta », La pensée française, 1, 3.

___ (1921), « Thiers », La pensée française, 3, 2-3.

___ (1922), Une occupation militaire d’après guerre. La Lorraine sous l’occupation allemande mars 1870, septembre1873, Nancy, Berger-Levrault.

___ (1922), « Victor Duruy », La pensée française, 22, 3-4.

___ (1923), « Comment la France exécuta le traité de Francfort. I », La nouvelle revue, LXVII, 97-107.

___ (1923), « Comment la France exécuta le traité de Francfort. II », La nouvelle revue, LXVIII, 193-202.

___ (1923), « 14 juillet », La pensée française, 54, 2-3.

___ (1925), « Le djebel druze », Le monde nouveau, 15 octobre.

___ (1937), « Poincaré jugé par les Allemands », Annales de l’Est, 36-59, 131-171, 295-316.

Sources d’archives

Archives nationales : dossier de carrière (F/17/23249 et AJ/16/1008), dossier de Légion d’honneur (LH/19800035/761/86497).